l'Acadienne

Newspaper
Year
1889
Month
1
Day
30
Article Title
l'Acadienne
Author
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Page Number
2
Article Type
Language
Article Contents
L’ACADIENNE Evangéline est morte! Evangéline vit encore! La fiction a disparu, mais la vertu et ses arômes flottent encore dans l’atmosphère de la vieille Acadie. La brunette ou la blonde Acadienne, gracieusement coiffée de son mouchoir de soie et drapée du costume qui révèle la simplicité de ses mœurs, est une image frappante de l’héroïne qui a inspiré à la plume aux ailes d’or d’un Longfellow l’un des plus beaux poèmes qui existent. Evangéline dort dans la tombe, à côté de Gabriel, et Evangéline se promène toujours sur les rives mélancoliques de l’Acadie. L’Acadienne est belle quand elle épanche son âme dans l’âme de Dieu; elle est sublime d’innocence quand elle prononce au pied de l’autel le oui qui devient alors pour elle et l’appui de sa grâce le mot le plus solennel, le plus grand de la langue qu’elle a héritée de ses pères. L’Acadienne est d’abord une fille prudente, candide et pure. A un moment donné, sortant du parterre de sa jeunesse pour entrer royalement dans le jardin de la vie à deux, elle change de rôle. Ce n’est plus la fille, c’est plus que la fiancée : l’Acadienne est devenue l’ange de bon secours d'un fils du pays de sa naissance, et la sœur de charité de celui avec qui elle montera et descendra désormais le fleuve de l’existence sur la même barque. Evangéline! Evangéline! le froid matérialiste ne te comprend pas. C’est un nouveau Brutus pour qui ta vertu n'est qu’un mot, tes charmes, un ornement inutile ou superflu. Dans la vie domestique, elle est la vigne fertile, et c’est sous ses yeux prudents que croissent les jeunes plants d’olivier. Dans le monde, elle ressemble à la fleur qui répand dans l’air les odeurs pures et suaves qu’elle recèle dans son sein virginal. Partout l’Acadienne est une reine. Le sang noble et généreux qui coule dans ses veines est le sang de Poutrincourt. L’Acadienne est l’honneur de notre nom et la gardienne vigilante du sanctuaire de la famille. L’ange de l’Acadie a protégé cette sauvegarde de nos communes dès son berceau, il veillera sur elle jusqu’au soir de sa vie : elle sera toujours l’image fidèle de l’immortelle fille de Grand Pré. Vive l’Acadienne! Puisse sa vertu croître d’âge en âge et son candide sourire chasser la tristesse qui semble encore flotter sur les hauteurs du Pays d’Evangéline. Vive l’Acadienne!