Le Patriotisme

Le Patriotisme L’homme est homme par son intelligence et son cœur. Un fou sans cœur n’est qu’une brute à forme humaine. Raisonnons donc le plus souvent possible et aimons ce qui est digne de notre affection. Puisqu’il faut toujours joindre l’action à la parole je vais me demander, dans ce court entretien, comment l’on comprend le patriotisme et comment on devrait le comprendre. D’habitude nous sommes tellement occupés aux choses matérielles de la vie que le patriotisme ne nous semble consister que dans le mépris de ceux qui ne sont pas des nôtres et dans les discours où le mérite des aïeux est évoqué. Cette première réponse est aussi courte que déplorable. Elle est due à notre inaction. Nous, descendants de la vieille France; nous sommes magnifiques et redoutables, que dans nos derniers retranchements—nos oppresseurs le savent bien. Corrigeons donc ce défaut qui nous empêche de paraitre tels que nous sommes; c’est-à dire des enfants de langue française née pour vivre catholiques. Oublions un instant l’intérêt personnel pour définir le patriotisme. C’est agir toujours et partout en citoyen intelligent, maitre de ses passions. Gardons donc précieusement notre foi et transmettons-là bien vive à la génération qui vient, parlons notre langue—forçons même les autres à la parler. Nous sommes les premiers occupants de cette terre que nous foulons, le français est encore une des langues officielles du pays tout entier; dans les circonstances n’aurions-nous pas le courage de parler notre langue même là où nous sommes en minorité. Notre langue et notre foi sont les conditions essentielles de notre vie nationale. Il faut, par conséquent, apporter un soin particulier à la presse acadienne qui les alimente, faisons-nous un devoir de la lire et de la faire lire. De nos jours le journal est le grand facteur des idées et la presse acadienne est rédigée dans un bon esprit, puisse-t-elle se répandre ; elle instruira, et unira les Acadiens et partant les rendra plus forts. Ne négligeons les nôtres dans aucune sphère, ils ont le droit d'attendre de nous au moins un secours indirect. Le succès d’un commerçant, d’un industriel; d’un agriculteur acadien doit nous réjouir. Soyons fiers. Rappelons-nous qu’on nous respectera en autant que nous nous respecterons nous-mêmes. Voilà, en quelques mots, ce qu’est le patriotisme. Croire que l’on peut aimer son pays sans agir c’est faire preuve d’un manque de logique, car aimer c’est vouloir du bien à quelqu’un. Si donc l’on veut sincèrement du bien à son pays l’on doit tâcher de lui en procurer autant que possible et pour cela il faut agir. Soyons patriotes dans la vraie, la seule acception du mot la patrie et la conscience en profiteront. ANATOLE VANIER