le Devoir du Moment

Newspaper
Year
1914
Month
10
Day
20
Article Title
le Devoir du Moment
Author
Arthur Mignault; Lorenzo Prince
Article Type
Language
Article Contents
LE DEVOIR DU MOMENT Canadiens Français le moment est venu de montrer par des actes que votre amour de la France est votre fidélité à la Couronne britannique ne sont pas des paroles qu’emporte le vent, mais viennent bien sincèrement du fond du cœur. L’heure est grave et ce n’est plus le temps de discuter. Depuis quelque temps déjà, le projet germait dans les esprits, les représentants les plus éminents de notre nationalité recommandaient à la jeunesse l’organisation d’un corps essentiellement canadienne-français, composé des nôtres, commandé par les nôtres et de lui confier la noble tâche de participer à la défense de notre ancienne mère patrie, à la gloire du drapeau qui nous couvre de ses plis, et à la revendication des principes de justice, d’équité, d’honneur et de civilisation dont les armées alliés sont des apôtres sur le continent de la vielle Europe. Tant que la sanction officielle n’avait pas été donnée à ce dessein, il pouvait être prématuré de se prononcer, aujourd’hui rien ne nous retient plus. Les autorités publiques et militaires ont donné leur adhésion plein et entière au plan de recrutement d’une unité essentiellement canadienne française. Le magnifique élan de notre jeunesse française qui a fourni déjà deux mille recrues au premiers corps expéditionnaire envoyé sur les champs de bataille, est une splendide expression de notre valeur, de notre patriotisme et de notre fidélité. Nous avons fourni plus que notre proportion dans les contingents partis, où le nombre des Canadiens d’origine canadienne française est presque aussi élevé que celui des Canadiens d’origine anglaises, la grande majorité se composants des réservistes britanniques établis dans le Canada au cours des quinze dernières années. Et cependant, nous ne croyons pas que le Canada ait encore assez fait. Les patriotes de notre race jugent avec raison que nous nous devons d’accentuer encore le sens de notre coopération au grand conflit qui met face à face le monde des barbares, des lucendiaires, des assassins. Nous devons proclamer que nous sommes prêts à verser notre sang pour le triomphe de tout ce qui nous est cher : foyer, famille, tradition et foi, contre la barbarie envahissante et le militarisme provocateur! Pour provoquer une manifestation frappante de ces sentiments, le recrutement d’un régiment français a été proposé au premier ministre du Canada et au ministre de la milice qui ont donné leur complet assentiment aux plans qui leur ont été soumis et qui vous seront exposés sous peu. Le chef de l’opposition et ses collègues ont chaleureusement approuvé le projet et promis de lui supporter tout leur concours. Nous savons que la population canadienne-française n’attendait qu’un signal, qu’un mot de ses chefs pour se prononcer et maintenant elle en a l’occasion. Elle va être à même de donner libre cours à ses héroïques aspirations, aux vertus militaires dont elle a reçu de ses ancêtres la puissante tradition; elle va pouvoir faire honneur aux héros de Carillon et de Châteauguay, montrer que bon sang ne saurait déchoir. Jamais cause ne fut plus sacrée que celle dant les armées anglaises sont les défenseurs; jamais combats ne furent plus légitimes que ceux dont l’armée françaises porte le fardeau. La France et l’Angleterre ont tout fait pour maintenir la paix du monde et seule la soldatesque allemande a empêché le succès de leurs loyaux efforts. Nous devons nous ranger du côté du bon droit et la France comme l’Angleterre doivent légitimement s’attendre à voir le Canada Français accourir à leurs secours. Eu prenant part aux batailles de l’Europe, le régiment canadien-français va remplir une triple mission de fidélité à son pays, à son roi et à sa mère-patrie. Le régiment canadien-français se battra pour le Canada, parce que la sûreté de ce pays dépend du succès des alliés et de l’écrasement de l’Allemagne. Le succès des troupes du Kaiser serait le signal de la décadence de l’Angleterre et de la ruine du Canada qui en serait la conséquence. La doctrine Monroe ne tiendrait pas cinq minutes devant l’Allemagne triomphante. Le régiment canadien-français se battra pour l’Angleterre parce que le Canada lui doit une reconnaissance Infinie pour le bonheur et la prospérité dont il a joui sous son régime, pour les libertés qu’elle lui a accordées, pour l’équité avec laquelle elle l’a traité, pour le rang qu’elle lui a donné dans le monde, pour la sécurité qu’elle lui a assuré, au prix de sacrifices d’hommes et d’argent. Enfin le régiment canadien français se battra pour la France, parce que la France, c’est notre mère, parce qu’elle a mis en nous tout ce qu’il y a de meilleure en elle; le courage, la valeur, l’honneur, la loyauté, parce que la France tient le flambeau de la civilisation qui nous éclaire; parce qu’elle est noire gloire et tout notre amour. Voilà pourquoi les Canadiens Français veulent aller se battre, épouser la querelle des alliés, venger leurs morts et tendre la main à leurs frères d’armes. Le recrutement va commencer immédiatement et nous sommes certains d’avance que personne ne reculera devant le devoir, que lui dicte sa conscience. Il faut que cette manifestation soit éclatante pour l’honneur du Canada Français et que notre population canadienne française n’ait qu’un mot sur les lèvres de tous : “FACE A L’ENNEMI.” Les secrétaires conjoints du comité d’organisation du Régiment Royal canadien français : Arthur Mignault Lorenzo Prince