Un peu d'histoire contemporaine

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Year
1899
Month
5
Day
4
Article Title
Un peu d'histoire contemporaine
Author
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Page Number
2
Article Type
Language
Article Contents
UN PEU D’HISTOIRE CONTEMPORAINE. Empêtré dans les chiffres, les dates et les faits par nous servis, sans compter le “micmac,” le confrère de Shediac a jugé que le plus sage était de se taire et de ne pas bouger. C’est la tactique de la bête traquée qui s'imagine par là éloigner le chasseur; nous connaissons ce vieux truc et nous continuerons à vous dépister.—Pas de repos pour les méchantes. * * * Nous voulons simplement établir une chose aujourd’hui : la versatilité de M. Melanson. Le mot est doux pour signifier inconstance dans ses opinions, trahison de ses chefs et déception de ses électeurs. Remontons au déluge. En 1886 le docteur Gaudet posa sa candidature avec un autre Français, et tous deux furent battus. Westmorland est constitué de telle sorte qu’il n’y a là place que pour un représentant français. Du moins c’est la leçon que nous dégageons de ces défaites successives. Aux élections suivantes, en 1890, les amis du docteur Gaudet le voulaient mettre sur les rangs de nouveau, mais M. Melanson réclama pour lui-même cet honneur. En sa qualité de candidat battu aux élections précédentes, le docteur avait le premier, droit à représenter les Acadiens, mais il fut assez généreux pour s’effacer et laisser le champ libre à M. Melanson. Ce dernier en retour lui promettait que puisqu’il se désistait en faveur d’un homme de la Côte du Nord, il appuierait de toutes ses forces, aux prochaines élections générales, un homme de la paroisse de Dorchester. Il agissait ainsi, disait-il, dans le but de poursuivre plus efficacement la construction d’une voie ferrée de Shediac au Cap-Tourmentin, une entreprise à laquelle les gens de Shediac s’intéressaient tout particulièrement. Cette raison en elle-même avait du bon, mais c'était par pure bonté dame que le docteur Gaudet laissait M. Melanson seul maître du champ de bataille afin de ne pas compromettre sa victoire. M. Melanson se présenta à l’électorat comme candidat INDEPENDANT. Etant le seul Acadien pour représenter Westmorland, ses nationaux n’avaient autre chose à faire que de lui donner leur vote, et les Anglais des deux partis politiques ne voyant en lui qu’un indépendant qu’on pourrait toujours compter parmi les siens, après les élections, accrûrent sa majorité d’autant. Le dernier et le plus noir des nègres, avec un nom français et un programme politique comme celui de M Melanson, eût sans plus de difficulté, franchi le seuil du parlement de Fredericton! Une fois élu; après avoir pris possession de son siège en Chambre, M. Melanson se déclara ouvertement pendant toute la session de 1890 pour l’administration de M. Blair. Il en était même si enthousiaste de ce gouvernement Blair que le 25 juin de cette même année, peu après l’ajournement de la Chambre, à l’assemblée de Moncton, tenue par l’Association du Gouvernement Provincial, il proposa la décision suivante : Décidé, Que cette assemblée des adhérents de l’administration locale actuelle au Nouveau-Brunswick désire enregistrer son appréciation de la manière dont le gouvernement conduit les affaires de cette province et s'engage à l’ appuyer cordialement. Oui, M. Melanson, le 25 juin 1890, dans la salle du W. C. T. U., de Moncton, lut ce petit document par lui composé et agrémenté d’un discours, et cette motion fat appuyé par M. Killam. Voilà un COALISE sorti du cerveau de Jupiter tout casqué. Un partisan si chaud de M. Blair a dû suivre sa fortune jusqu’au dernier souffle! Vous connaissez mal l’esprit versatile du monsieur. A la session suivante, entassant surprise sur surprise, il se déclare non moins ouverte ment CONTRE M. Blair qu’il ne s'était fait enregistrer, peu auparavant, parmi les admirateurs de ses actes. Et cependant pour modifier ses vues, aucune mesure gouvernementale n’avait été prise dans l'intervalle de ces deux revirements. Est-ce là le fait d'un homme sérieux ou d’un imbécile qui se laisse mener par ses nerfs? Il faut admettre que M. Melanson eut la consistance de voter contre M. Blair pendant les sessions de 1891 et 1892. Le mot de “visions” a été prononcé en Chambre de Fredericton, l’autre jour, on voit que le député de Westmorland en est hanté. Il se fait élire comme INDEPENDANT. Il a une vision de deux partis le portant à la Chambre. Il SE TIENT AUX COTES DE M. BLAIR, toute une session. Il a une vision et se fait enregistrer comme le plus dévoué de ses partisans. Il obtient du gouvernement tout le profit possible et, ayant une autre vision, IL SE TOURNE EN TRAITRE CONTRE LUI et le calomnie. Voilà l’homme aux principes inébranlables; voilà le parangon des politiciens. Découvrez-vous, électeurs de Westmorland; prosternez-vous, rédacteurs du “Moniteur,” voici le député CAMELEON! Ajournement.