Correspondance: quelques notes sur Bouctouche

Year
1890
Month
2
Day
7
Article Title
Correspondance: quelques notes sur Bouctouche
Author
Sylvain
Page Number
1
Article Type
Language
Article Contents
Vol. XXIII.–No. 59 Correspondance. QUELQUES NOTES SUR BOUCTOUCHE (suite) M. le Rédacteur, Le premier juillet 1785, François et Charles LeBlanc venaient au soin de leur famille à Memramcook. A leur arrivée un grand nombre de personnes se rassemblèrent chez le vieux Charlitte pour attendre le rapport des deux explorateurs qui racontèrent avec beaucoup d’entrain les aventures de leur voyage tout en faisant le plus bel éloge de Bouctouche, le lieu de leur choisi pour y fonder une colonie. Ils déclarèrent leur ferme détermination d’y aller planter leurs pénates aussitôt qu’ils pourraient s’organiser pour le voyage. Ils firent de vives instances auprès de leurs parents et amis pour les y suivre, leur promettant que Bouctouche, dans un avenir très rapproché deviendrait une Paroisse, grande, belle et prospère. Comme toujours, dans ces circonstances, où les preuves doivent s’appuyer sur des faits, pour s’imposer à la croyance publique, il se trouvait des incrédules. D’ailleurs, songeons un instant aux difficultés qui se présentaient naturellement à ces pauvres gens, comparativement sans ressources, quand il s’agissait d’aller s’établir dans une localité alors inconnue, loin de tout centre de commerce, au milieu de quelques familles sauvages à peine civilisées. Bouctouche, pour les habitants de Memramcook, devait paraître alors quelque chose comme les prairies du Nord-Ouest aux yeux des habitants de Kamouraska. De plus, il fallait dire adieu à des parents et à des amis dont la longue persécution avait serré les liens. Memramcook avait son missionnaire résidant, le Rév. Messaire LeRoux, qui se sacrifiait pour ses ouailles, et pour ces fervants chrétiens qui connaissaient toute la valeur de la religion il était bien difficile de s’éloigner du clocher paroissial pour s’enfoncer dans les forêts où les consolations du ministère du prêtre devaient être inaccessibles qu’à des périodes très éloignées. Pour ces raisons, et encore bien d’autres, nous devons comprendre combien il fallait de volonté à ces premiers colons pour s’en aller fonder un établissement à Bouctouche. Mais François et Charles étaient des hommes de fortes résolutions. Ils songeaient surtout à l’avenir de leurs enfants qui pourraient se multiplier dans ces forêts vierges et donner à la génération future un pied à terre dans le pays de leurs ancêtres. Ils se préparèrent donc à partir au printemps suivant avec leurs familles et leurs petits butins. Le vieux Charlitte, leur père, encourageait beaucoup, comme il est dit plus haut, ce plan de colonisation et il donne à ses enfants en même temps que de sages avis, tout le secours dont il pouvait disposer. Deux frères, Isidore Bastarache, marié à Rosalie Leblanc, proche parente des Charlitte, et Joseph Bastarache, marié à Marie Girouard, se joignirent à la caravane ainsi que Jean Desroches, marié à leur sœur Esther Bastarache et qui était arrivé l’année précédente de l’Ile St-Jean, dans une grande pauvreté. Pendant l’hiver les hommes se rendirent à Gédaïc et y firent des bateaux de troncs d’arbres pour transporter leur ménage au printemps. Or, le 15 mai 1786, ces cinq familles disaient adieu à la vallée de Memramcook, au clocher de leur église, à leurs parents et amis, à leur vénéré missionnaire qui les a béni de tout son cœur, pour aller fonder la paroisse de Bouctouche. Comme les noms de ces braves pionniers doivent être un objet de vénération et de reconnaissance pour leurs nombreux descendants dans la paroisse de Bouctouche, je les grouperai ici pour mémoire perpétuelle : François Leblanc marié à Hélène Breau ; Charles Leblanc ‘’ Marie Breau ; (frères) (sœurs) Isidore Bastarache ‘’ Rosalie LeBlanc ; Joseph Bastarache ‘’ Marie Girouard ; (frères) Jean Desroches ‘’ Esther Bastarache. P.S. J’ai dit plus haut que Joseph Goguen s’était marié dans un âge très avancé. C’est vrai quant à son dernier mariage qu’il célébrait à l’âge de 75 ans. Mais il s’était déjà marié deux fois, ce qui explique d’ailleurs le grand nombre de rameux qui ont poussé sur cette souche antique. Votre serviteur, SYLVAIN.