Une Assemblée Patriotique à Memramcook

Année
1909
Mois
1
Jour
28
Titre de l'article
Une Assemblée Patriotique à Memramcook
Auteur
Megeppa
Page(s)
1
Type d'article
Langue
Contenu de l'article
Une Assemblée Patriotique à Memramcook Un auditoire nombreux et distingué, répondant à l’invitation cordiale de la Société des Artisans de Memramcook, dimanche, le 3 janvier, comblait les sièges de la salle LeBlanc. Au milieu de cette élite patriotique, on remarquait des dames à côté de jeunes filles riantes, des jeunes hommes à côté de vieillards à cheveux blancs. Toute cette foule un peu bruyante, joyeuse, jubilait dans l’attente d’orateurs aussi savants que distingués, qui devaient développer quelques fragments de la grande épopée acadienne. Son espoir fut satisfait, quand M. Edouard Gaudet, agissant comme président, présenta d’une manière aussi laconique qu’heureuse M. Camille Gaudet au public, qui le reçut avec applaudissements. S’inspirant aux sources de l’histoire authentique, le jeune philosophe, dans un langue aussi simple qu’élégant, développa les péripéries de l’“Invasion Canadienne,” à jamais immortelle, avant l’infâme dispersion de 1755. En termes heureux, l’excellent conférencier fit ressortir les souffrances, les revers, la ténacité sublime de ces fiers soldats à la vieil, le France; enfin la débâcle générale, sous le vent du malheur, qui précéda le sinistre dérangement. Dans la dernière partie de sa conférence, l’orateur narra l’histoire, à la fois si touchante et si belle, d’Evangéline, l’ange d’un peuple en exil, immortalisé par Longfellow dans son poème incomparable. La conférence de M. Gaudet fut plusieurs fois soulignée d’applaudissements. M. le président eut ensuite le plaisir de présenter M. Cormier, grand organisateur de la Société des Artisans Canadiens Français à l’auditoire, qui le reçut avec de sympathiques applaudissements. Avec une verve, à la fois spirituelle et aimable, le distingué visiteur salue l’assemblée, et félicite spécialement les dames d’être venues en aussi grand nombre. Puis attaquant son sujet, l’orateur expose la situation financière de cette société éminemment française, avec son record supérieur, qui toujours prospère, tout en jouant un rôle prépondérant et salutaire au cœur de la population canadienne, tant des Etats Unis que de la province de Québec. Puis dans un élan pathétique, l’orateur déclare qu’aujourd’hui comme autrefois De Ramezay avec ses indomptables soldats, les Canadiens Français, nous tendent une main fraternelle, chérissent comme nous cet unique idéal, l’extension de la race française en Amérique. M. Cormier reprit son siège au milieu d’applaudissements. M. le président appelle alors M. Napoléon Landry, professeur au collège Sainte Anne, et le présente à l’auditoire, qui le reçoit avec non moins de sympathie que les orateurs précédents. Notre jeune philosophe félicite d’abord le digne conférencier qui vient de remporter un heureux succès : --et comme son excellent confrère vient de toucher les grandes époque de l’histoire acadienne, en suivant un plan très lucide, M. Landry dans son exorde déclare : --Je ne vous parlerai pas, chers compatriotes, de la fondation de Port Royal par De Mont il y a déjà trois cents ans du courage, des souffrances, des succès de ces hardis pionniers de la civilisation venus de Bretagne et de Normandie, je ne vous parlerai point du grand dérangement, de cette “guerre folle” de 1753, qui fait aujourd’hui rougir l’Angleterre de honte : --ni de notre résurrection nationale, qui fait, comme on l’a dit, “l’admiration du monde entier :”—Mais je vous parlerai, un peu de leurs descendants, nos frères, les Acadiens Français de la Baie Sainte-Marie. En effet M. Landry, avec une verve éloquente, une précision remarquable, fit voir dans un tableau splendide, la vie heureuse de ces acadiens avec leurs églises, leurs villages, leurs ports, dont l’existence bénie s’écoule tranquille, sur ce coin de terre, au bord de la mer. Puis M. Landry fait l’éloge des bons Pères, venus de la vieilles France, qui ont adopté cette terre, à la fois “le berceau et la tombe d’un peuple,” comme leur patrie; et qui maintenant dirigent une maison d’éducation de premier ordre : aussi florissante qu’elle le mérite; car elle fait un bien intellectuel immense en cette partie d’Acadie. Dans une péroraison vigoureuse et ardente, l’orateur met en relief la valeur de l’éducation : puis en terminant, prévoit que dans vingt à trente ans, “sans être prophète” dit-il, “qu’avec le progrès intellectuel et matériel actuel, la lutte intense pour la liberté de nos droits la fécondité de nos familles acadiennes, l’Acadie de la ‘douce’ France, sera rendue à ses légitimes propriétaires, aux descendants de Grand-Pré, aux Acadiens Français des Provinces Maritimes.” Le discours de M. Landry, rendu avec la voix qu’on lui connaît, réveille une observation psychologique profonde et minutieuse d’un peuple jeune encore; tout en ayant une heureuse forme littéraire. En remerciant l’auditoire de sa bienveillante attention, l’orateur reprit son siège au milieu d’applaudissements réitérés, quand notre digne député M. Léger salue l’assemblée, et félicite chaleureusement les orateurs qui venaient d’adresser la parole, déclarant que ces Messieurs devant n’importe quel auditoire feraient honneur à leur Alma-Mater.” Puis notre député énumère avec l’assemblée la situation politique et sociale des acadiens dans le comté de Westmorland tout en invitant ses compatriotes à imiter fidèlement dans les luttes actuelles, le courage, la ténacité, les vertus sublimes des ancêtres, qui préférèrent, comme les martyres des catacombes, la persécution, la mort, plutôt que de signer un serment inique défendu par leur religion et leur Dieu. Notre député met ensuite en relief, l’influence considérable des deux langues, l’anglaise dans le commerce et exhorte ses compatriotes à parler surtout cette langue française, que l’on parle dans toutes les cours d’Europe, la langue des traités, de la philosophie et des sciences, cette langue si douce et si belle, que nous a apprise notre mère en berçant notre enfance : car la seul est notre salut. “Mêlant l’agréable à l’utile” dans les intervalle, M. Sifroid Gaudet, dirigeant un chœur choisi, fit exécuter avec une harmonie remarquable, plusieurs compositions vocales, que l’auditoire ravi applaudit frénétiquement. La succursale numéro 112 des Artisans remercie la foule pour son aimable présence, aussi que les excellents orateurs qui ont remporté un succès notoire. Courage, Acadiens! “c’est le blé qui lève”, méditons notre histoire, luttons avec prudence, justice et noblesse, afin que dans la conquête de nos libertés, de nos droits, dans ces temps modernes, l’histoire puisse dire, comme aux temps des croisades : “Gesta Dei per Francos.” Mageppa