De l'étude des sciences

Journal
Année
1888
Mois
7
Jour
18
Titre de l'article
De l'étude des sciences
Auteur
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Page(s)
2
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DE L’ETUDE DES SCIENCES Nous avons promis quelques commentaires sur le discours que l’hon. P. S. Poirier, membre du Sénat, a lu au Collège St. Joseph, le 21 juin dernier. Comme nos lecteurs le savent maintenant, le discours dont il s’agit ayant été publié dans les colonnes de L’EVANGÉLINE, l’hon. P.S. Poirier a voulu démonter l’importance des sciences, et des sciences naturelles surtout, dans l’enseignement. Les langues grecques et latine occupent généralement une attention trop scrupuleuse comparée au temps limité qu’on dévoue dans la plupart de nos institutions classiques, à l’étude approfondie des sciences, - connaissances plus en rapport avec les exigences multiformes du pays dans les circonstances actuelles. Nous ne voulons pas nier l’importance de la langue latine dans l’enseignement des Séminaires – puisque ces Institutions ont plus spécialement pour but de former des jeunes gens pour l’étude de la théologie – mais que les langues latine et grecque soient et continuent d’être une des parties les plus essentielles du programme de l’enseignement de nos collèges est une chose qui ne nous paraît pas raisonnable. Sur dix années de cours, quatre sont consacrées au cours commercial, quatre à l’étude superficielle des belles-lettres comparée à l’étude plus minutieuse des langues mortes qui constituent les branches spéciales de l’enseignement de ces quatre années, et enfin les deux dernières du cours sont dévouées à l’étude de la philosophie et des sciences en générale. A part l’histoire du Canada et de la géographie, l’histoire universelle comprend une partie du cours connu, dans nos colléges, sous le nom “d’humanités.” Un tel programme nous a toujours paru défectueux; celui que l’hon. P. S. Poirier vient de laisser entrevoir nous semble plus conforme aux exigences du pays, plutôt de nature à faire de la jeunesse tout ce dont les parents rêvent pour ceux de leurs enfants qu’ils envoient au collège, quelque fois aux prix de grands sacrifices. Dire que beaucoup de jeunes gens qui sortent de nos institutions canadiennes après avoir laborieusement gagné les initiales de A. M., A. B., et B. L., ne connaissent pas assez leur langue pour élucubrer un article qui puisse faire honneur à une revue ou à un simple journal de campagne suffit pour prouver que le programme que ces jeunes gens ont suivi pêche de quelque côté. Si ces mêmes jeunes gens avaient moins entendu parler du pi, béta, phi, du cappa, lambda, mu, nu, ro, de l’iota touserit et des noms en a pur, au détriment de la grammaire de leur langue qu’ils avaient plus de raison d’étudier, il en serait, même de leur opinion, beaucoup mieux pour eux. D’autre part, personne ne peut nier que l’étude des sciences telle que comprise dans nos collèges n’est pas superficielle; en effet, comment peut-on se renseigner convenablement sur chacune des sciences les plus nécessaires en deux années de dix mois quand il faut, pendant ce temps déjà trop court, se ferrer surtout sur les mathématiques et la philosophie. Si on consacrait plus de temps à l’étude des sciences géologiques et minéralogiques et moins de temps à l’étude des hellénistes de l’antiquité, bien que n’étant pas encore parfait, le cours promettrait peut-être de meilleurs résultats. Ces remarques faites au fil de la plume ne constituent pas une critique directe du discours de l’hon. P. S. Poirier; elles sont plutôt nées des observations judicieuses dont le discours en question est rempli et suffiront, nous ôsons espérer, pour faire comprendre à nos lecteurs que nous approuvons de la généralité des vues de l’hon. gentilhomme en ce qui concerne la grande et très-importante question de l’enseignement au point de vue des intérêts du pays en général. Pour terminer, nous ajouterons que le discours que l’hon. Poirier a lu à Memramcook, le 21 juin dernier, est parsemé de vérités importantes et dignes de la plus sérieuse attention de ceux qui ont le soin grandement responsable de l’instruction de notre jeunesse canadienne et acadienne. C’est non-seulement un bijou littéraire mais surtout un bouquet ou brille le bon sens pratique du maitre.