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Journal
Année
1888
Mois
1
Jour
25
Titre de l'article
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Auteur
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Page(s)
2
Type d'article
Langue
Contenu de l'article
On parle souvent de l'erreur déplorable dont se rendent coupables ceux de nos compatriotes qui abandonnent le sol natal pour aller travailler en mercenaires dans les usines de la république Américaine, et user ainsi la plus belle partie de leur vie au profit de races et d'un gouvernement étrangers; oui, nos missionnaires, nos prêtres ont tour à tour démontré les conséquences fâcheuses de cette expatriation; la presse en a parlé longuement et démonstrativement aussi; en un mot rien été négligé pour détourner ce courant fatal. Aujourd'hui, dans l'intérêt de ceux dont nous nous sommes engagés à défendre les droits méconnus, à protéger dans les moments difficiles, à éclairer en tout temps et toujours, nous nous permettrons quelques remarques à propos d’une autre question d'émigration momentanée, mais souvent néfaste en conséquence qui devraient pourtant faire ouvrir les yeux. II ne s'agit pas de ceux qui travaillent dans les manufactures, dans les chantiers, mais de ces gens infortunes, acadiens et autres des Provinces Maritimes et surtout de la Nouvelle-Ecosse, qui vont en grand nombre, faire la pèche dans les eaux fertiles de Gloucester, Mass. Pendant l'automne dernier seulement, qui croirait que cent vingt-sept malheureux ont péri dans les flots? Quand on rapporte la nouvelle que les vaisseaux de Gloucester, ceux même que montent nos compatriotes, sont, pour la plupart, de véritables galères, ou comme dit un journal anglais, des cercueils flottants, il n'y a rien qui étonne dans cette statistique. Au lieu d'aller risquer leur vie au milieu des eaux américaines, pourquoi nos pêcheurs ne resteraient-ils pas au pays, ou s'ils tiennent absolument à gagner leur pain sur la mer, pourquoi ne s'assureraient-ils pas d’abord, s'ils sont au service de maîtres étrangers, que les goëlettes qu'ils montent sont propres à affronter les tempêtes? Qui aime le danger y périra; c'est un fait indéniable. Et dites-nous, est-ce faire preuve de sagesse, qu’on se soucie beaucoup de l'avenir que de consentir à l'exposer en mer sur de vieilles goëlettes pourries de la carlingue aux préceintes? Les propriétaires de ces masures flottantes sont, sans doute, fort à blâmer par le fait qu'ils font à leurs employés l'obligation de les équiper, mais d'un autre côté, pourquoi exposer sa vie pour gagner sa vie ? Comment font ceux qui ne se sont jamais fait balancer sur les vagues? sont-ils moins riches, moins heureux! Qu'on jette un coup d'œil sur les campagnes, et le problème sera aussitôt résolu. Pour terminer, nous conseillons aux parents de ne pas permettre que leurs jeunes gens aillent ainsi s'exposer sur les bâtiments de Gloucester, Mass. S'ils faut nécessairement qu'ils s'expatrient, bien alors, qu'ils s'engagent, cela n'est pas dans l'ordre des choses impossibles, à travailler sur la terre. Quand il devient nécessaire de s'environner de périls pour vivre, il est sage de choisir l'endroit où il sont moins nombreux. Nous publions dans une autre colonne une belle lettre de M. Théodore H. Rand, D. C. L., qui a été autrefois surintendant des écoles en cette Province, position qu’il a ensuite occupé avec honneur dans la Province sœur, le Nouveau-Brunswick. M. Rand, qui est aujourd’hui le président du collège de Woodstock, Ontario, a beaucoup fait pour la grande cause de l’idée ici comme chez nos voisins. Comme autrefois Lord Durham, l’un de nos anciens gouverneurs généraux, cet homme qui a laissé un si beau souvenir en ces provinces encourageait le culte de la belle langue française chez les Acadiens et faisant tout en son pouvoir pour promouvoir la cause de l’éducation chez nous. La lettre que nous publions de ce vieil ami de la nation acadienne laisse entrevoir l’honorabilité de son caractère, et nous prouve encore une fois son esprit impartial, son amour du droit et de la justice. Jusqu’ici, nos jeunes compatriotes des bords de la Baie Ste. Marie n’ont pas eu l'avantage de pouvoir puiser dans une institution locale une instruction réellement supérieure; nos jeunes filles, au contraire, plus privilégiées ce semble, ont pu se dispenser d’aller suivre les cours d’enseignement supérieur à l’étranger. Deux couvents, dont l'un, assez monumental quant à présent, celui de Météghan, a rendu d'importants services à nos compatriotes de cette partie du pays au point de vue social. Beaucoup de nos jeunes gens ont profité des heureuses années qu'ils ont passé aux collèges St. Joseph et St. Louis; grand nombre de nos jeunes filles ont étudié dans nos maisons d’éducation du comté de Digby, mais ce n'est pas assez. Dans un siècle de progrès comme celui où nous sommes, la culture de l’esprit est d’une importance majeure, d’une nécessité toujours de plus en plus impérieuse. Les dames qui président aux cours du Couvent de Météghan sont dévouées, instruites, et dignes sous tous les rapports du noble soin qui leur est commis. Les élèves qu’on place sous leur di- (blank) seulement les aimables et délicates vertus qui font le plus bel apanage de leur sexe, mais ces vertus civiques qui jointes aux secrets de la science, constituent pour elles un bien qui les met, de bonne heure, en état de rendre service à la société. En ce qui concerne l'éducation des jeunes filles, nous ne partageons pas l’opinion d'un philosophe moderne, le célèbre Joseph de Maistre; nous aimerions qu'on les favorisât autant que les hommes; que par les richesses de leur esprit elles pussent faire pour la cause sociale ce que bien des indidus de nos jours ne font malheureusement pas. Comme nous comptons revenir sur le sujet auquel nous venons seulement de toucher, nous terminerons par dire à nos lecteurs : au revoir!