Restons Chez Nous et Conservons Notre Langue.

Journal
Année
1911
Mois
5
Jour
16
Titre de l'article
Restons Chez Nous et Conservons Notre Langue.
Auteur
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Page(s)
4
Type d'article
Langue
Contenu de l'article
Restons Chez Nous et Conservons Notre Langue. Ces mots qui résument les destinées de notre race ne nous sont pas inconnus; souvent nous avons applaudi avec enthousiasme en les entendant prononcer; mais souvent aussi, hélas nous les avons oubliés. Il est donc nécessaire de revenir fréquemment à la charge, de faire sentir l’importance qu’il y a pour nous, Acadiens-Français, à conserver intacte notre langue, si nous ne voulons pas perdre notre liberté, notre indépendance et surtout notre prestige à l’égard des nationalités rivales. On doit se mettre en garde contre l’anglomanie. Ce mal, qui mine peu à peu notre population acadienne, se déplore plus spécialement dans les centres où l’élément anglais l’emporte. On s’habitue petit à petit aux tournures anglaises; on mêle, dans sa conversation, les mots des deux langues, d’abord par inattention, puis par forfauterie, et l’on pousse, comme cela, la lâcheté jusqu’au mépris de son origine et de l’idiome qu’on a appris a bégayer sur les genoux de sa mère. Ce fait des plus honteux n’en est pas moins réel, et prouve jusqu’à quelle décadence cette insouciance, ou plutôt ce manque de fierté nationale, peut nous conduire, s’il n’est enrayé dès l’abord. Il est donc grand temps de mettre un terme à ce malheureux état de choses, en montrant aux étrangers que nous avons assez d’union et d’esprit civique pour faire reconnaître notre autorité et nos droits. Or, nous ne pouvons arriver à ce but éminemment patriotique, qu’en autant que nous nous grouperons auprès du même drapeau et ce drapeau s’est l’étandard étoilé de l’Acadie. Pourquoi déserter notre sol qui nous est cher à plus d’un titre pour aller courir l’aventure dans des pays inconnus, pendant que notre province referme des trésors au point de vue de la culture et de la pêche? Bien souvent, sur la réclame barnumesque d’un “Cobalt” ou d’autres intérêts pécunaires qui, la plupart du temps, ne sont que fictifs ou bien peu vraisemblables, on quittera sa terre et son foyer pour aller sacrifier à quelques pièces de monaie sa langue, ses croyances, en même temps que les libertés de sa nationalité. Soyons donc unis par le même langage, sur une même terre, et sachons, ensemble, en exploiter les richesse, tout en faisant fleurir ses institutions, ses lettres et ses arts. Notre belle province possède assez de resources pour tous qu’elle leguerait avec bonheur à nos enfants. Pourquoi ne pas en profiter, non seulement pour notre bénéfice personnel, mais encore pour la propagation de notre race, nous rappelant que chacun de nous est d’une nationalité qu’il doit avoir à cœur de conserver, faire grandir et prospérer.