Correspondance - A Propos d'un Collège Français

Journal
Année
1904
Mois
1
Jour
21
Titre de l'article
Correspondance - A Propos d'un Collège Français
Auteur
Acadien
Page(s)
5
Type d'article
Langue
Contenu de l'article
Correspondance A PROPOS D'UN COLLEGE FRANCAIS M. le Rédacteur Il y a quelque temps, je lisais dans les colonnes de L'IMPARTIAL une correspondance d'un vrai patriote qui disait que nous devrions avoir un collège français dans cette province. Aussitôt qu'eut paru cet article, des personnes, qui aimeraient mieux voir arriver le déluge qu'une institution où l'enseignement de la langue française parmi nous serait établi sur des bases solides, ont commencé à crier à tort et à travers qu'un tel projet est irréalisable; que les Français sont trop pauvres, etc. etc. Maintenant, pourquoi les Français de l'Ile du P. Edouard qui sont jugés assez riches pour aider de leurs deniers des institutions qui leur sont étrangères, sont-ils regardés comme étant trop pauvres pour s'aider eux-mêmes et aviser à des moyens de propager l'avancement de leur langue maternelle? Pourquoi? Parce que l'on veut continuer à nous tenir à l'arrière-plan comme toujours. C'est tout simple. Du moment où l'on comprend, même de la manière la plus indirecte, que les Français veulent s'affirmer, on invente mille raisons banales pour les empêcher d'arriver, et malheureusement il s'en trouve toujours quelques uns des nôtres -qui devraient savoir mieux-qui se laissent emporter par ce faux courant. Nous ne devons jamais perdre de vue que si nous voulons rester ce que nous sommes—Français—nous devons porter un soin, tout particulier à l'instruction et à l'éducation de nos jeunes gens en leur langue maternelle, sous peine de nous voir complètement effacés et de nous perdre dans le gouffre de l'anglomanie dont les effets sont déjà si désastreux pour un trop grand nombre. Si les Français de cette province qui travaillent avec tant d'ardeur et d'enthousiasme à faire progresser toutes sortes de sociétés étrangères unissaient leurs efforts vers un but unique, dans une ambition commune, ne serait-ce pas le moyen le plus prompt, le plus sûr, le plus efficace d'arriver à un résultat pratique, en matière d'éducation comme en autres choses? Certainement, et nous n'avons que ce seul moyen de nous maintenir. Travaillons ensemble et nous réussirons. L'union fait la force. On vient nous dire : Il faut de la réflexion et de la sagesse pour mettre un tel projet à exécution. C'est admis. Mais n'avons-nous pas parmi nos Acadiens des hommes qui savent réfléchir et qui possèdent la sagesse à un degré suffisant pour nous guider dans l'accomplissement de ces choses si désirables à l'avancement intellectuelle de notre race? N'avons-nous pas nos prêtres acadiens qui ne demandent que de la bonne volonté et de l'encouragement de notre part pour nous tracer les plans, d'une si noble entreprise et nous aider à la conduire à bonne fin? Ne nous laissons pas emporter par le faux raisonnement de ceux qui nous disent qu'il ne doit pas y avoir de nationalité distincte dans ce pays. Ceux qui prêchent cette fausse doctrine ont déjà oublié leur langue maternelle; et quand on a perdu ce précieux dépôt, on est assez enfoncé pour renier sa nationalité sans rougir et embaucher les autres à faire de même. C'est cet acte d'apostasie nationale qui poussent ces mauvais conseillers à mettre des entraves en tout ce que nous entreprenons qui tend à notre avancement. Ne nous laissons pas entraîner par des faux amis : montrons-nous soucieux de nos propres intérêts; plaçons-nous sous l'égide de nos prêtres acadiens qui dans leur sagesse sauront nous conduire dans une entreprise qui est bien légitime et qui ne peut porter ombrage à qui que ce soit. Que de belles choses nous pourrions accomplir si nous nous entendions. Nous aurions un collège avec le reste. 14 janvier 1904. ACADIEN