Situation des acadiens dans la confédération

Journal
Année
1890
Mois
8
Jour
14
Titre de l'article
Situation des acadiens dans la confédération
Auteur
M. Pascal Poirier
Page(s)
2
Type d'article
Langue
Contenu de l'article
SITUATION DES ACADIENS DANS LA CONFÉDÉRATION (Rapport de M. Pascal Poirier, 24 Juin, 1880 à la 7éme commission de 1a convention de Québec.) “Au Nouveau-Brunswick, les centres où l’agriculture est le mieux entendue, sont Saint-Louis, Fox-Creek, Memramcook, Sainte-Marie et Saint-Basile. “Les Acadiens de la Nouvelle- Ecosse sont moins avancés sous ce rapport que ceux des provinces sœurs. Ils se livrent davantage à l’exploitation de la pêche. A peine peut-on excepter ceux de la baie de Sainte-Marie, de Chezzetcook, de Hàvre-à-Boucher et de Margarie [Margaree]. “Les pêcheries qui sont une des principales sources de richesse de la Confédération, sont largement exploitées par la population acadienne. “L’Acadien aime l’océan et ses orages. Cette vie de dangers, de hazards, lui plaît comme à ses frères de Normandie. Elle lui rapelle son histoire, l’histoire de ses pères. De tout temps la mer, lorsque les forêts ne suffisaient plus à le soustraire à la persécution, fut son refuge. Pendant les premières années qui suivirent la déportation, la pêche fut souvent sa seule ressource, son seul moyen de subsistance. Il n’en est plus ainsi de nos jours. Si l’on excepte les Iles de la Madeleine et les établissements de la l’Ile Madame, au Cap-Breton, la pêche n’est plus guère, pour les Acadiens des autres localités, qu’un objet de luxe, une réminiscence d’anciennes habitudes aimées. Un grand nombre font la pêche en amateurs. Aussi la font-ils, la plupart du temps, au détriment de l’agriculture, plus productive souvent, plus sûre toujours. “Tout le monde, dans les provinces maritimes, admet la supériorité du Français comme pêcheur intrépide. Dans un voyage que je fis, en 1876, à l’Ile du Prince-Edouard, un Anglais ou Ecossais enthousiaste me disait qu’il n’y avait pas en Amérique de pêcheurs pour rivaliser avec ceux de Tignish et de Rustico. Et pourtant ceux de la Baie-des-Chaleurs et du comté de Gloucester, de Clare, et de Chéticamp, ne le cèdent eu rien à ceux de l’Ile du Prince-Edouard. “Les établissements de pêche ou les Acadiens jouissent de la plus grande aisance sont Arichat avec les établissements environnants, et la baie de Sainte-Marie. A Arichat surtout il y a toute une aristocratie de pêcheurs, de caboteurs et de navigateurs de long cours, qui sont absolument à l’aise, pour ne pas dire riches. Propriétaires de goëlettes, quelques-uns même de véritables bricks, ils font des courses lointaines à leurs dépens et profits. “Malheureusement, certains autres établissements sont moins favorisés sous le rapport de la fortune. Des industriels étrangers ont établi au Cap Breton et à la Baie-des-Chaleurs des fabriques au moyen desquelles ils se sont emparés du monopole de la pêche qu’ils gardent encore, en exploitant sur une échelle plus ou moins vaste les pêcheurs acadiens. “Pour se faire une juste idée de l’importance des pêcheries des provinces maritimes et de la part qu’y prenneut les Acadiens, il faut recourir à la statistique. “Le produit de la pêche pour l’Ile du Prince-Edouard seule s’est élevé, en 1879, à la somme de $1,402,201,40. Le nombre d’hommes employés à cette industrie a été de 5198. Or, Prince seule, le comté le plus français de l’Ile, a fourni 2,461 hommes, c’est-à-dire, à peu près la moitié; Queen, dans lequel sont situées les paroisses françaises de Rustico et de Hope-River, a contribué pour plus d’un quart, soit 1,394. “La proportion de pêcheurs acadiens, eu égard au chiffre total de leur population, a été moins grande au Nouveau-Brunswick, où le livre-bleu accuse, pour la même année, un produit de $2,554,772,22. “Cependant sur 8,053 hommes, s’occupant de cette industrie, le comté de Gloucester fournit 1603 et celui de Kent 2,305, c’est-à-dire, la moitié du nombre total. Gloucester et Kent, comme vous le savez, sont français. “Dans la Nouvelle-Ecosse, les Acadiens, si l’on tient compte de leur population, se livrent à la pêche dans une proportion plus grande encore que ceux de l’Ile de Prince-Edouard. “Le produit des pêcheries pour cette riche province, a été, l’année dernière, de $5,752,936.20. Le nombre d'hommes employés est porté à 27,610. Nous trouvons pour le comté de Richmond, où sont les établissements français de l'Ile-Madame, de l’Ardoise, de la Rivière Bourgeois, etc., 2,513 pêcheurs; Digby, dans lequel se trouve le groupe acadien de la baie de Saint-Marie, en fournit 1,775, et Inverness, où se trouvent Chéticamp et Margarie, 2,048. Total 6,336 pêcheurs, la plupart acadiens. Or, la proportion des Acadiens dans la Nouvelle-Ecosse est de 33,000 sur 4000,000 habitants, chiffre rond. “Ajoutez à ces trois provinces les pêcheurs acadiens des Iles de la Madeleine, de côtes du Labrador et de la Gaspésie, et le résultat placera ce petit peuple à la tête des pêcheries de la Puissance. Le premier élément de force et de stabilité dans nos pêcheries réside dans les Acadiens-Française.—Extrait.