Fête nationale à Rogersville

Année
1898
Mois
8
Jour
25
Titre de l'article
Fête nationale à Rogersville
Auteur
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Page(s)
3
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FETE NATIONALE A ROGERSVILLE. Un grand pique-nique commencé le 14 se termina le 15 au soir. Des pavillons flottaient partout. L’église était pavoisée de fleurs et de drapeaux. Une messe solennelle fut chantée le matin par le Révd. Père Chiasson. ancien curé de cette paroisse. Le sermon de circonstance a été prononcé par le Révd. Père Bonaventure, Rédemptoriste de la mission de Restigouche. L’orateur charma l’assemblée des fidèles et fit perler plus d’une larme sur les joues des acadiens en renouvelant les tristes souvenirs attachés à l’histoire acadienne. Après la messe les tables de rafraîchissements, de bazar et les jeux furent envahies par la foule. De magnifiques tables étaient dressés dans le haut de l’école. Le soir à 7 heures eut lieu une soirée dramatique dans une magnifique grande salle située au dessus de la beurrerie. Il y avait au moins 400 personnes. Les sièges d’honneur étaient occupé par l’hon. M. Chs. LaBillois, M. P. P., ministre de l’agriculture, Urbain Johnson, M. P. P. pour Kent, John O’Brien, M. P. P. pour Northumberland, Dr. W. Grignon, conférencier agricole, Révd. M. Dickson, curé de Newcastle, Révd. Père Bonaventure, Révd. M. Chiasson de la Nouvelle-Ecosse, le Révd. M. F. Richard, curé de Rogersville, et M. L. C. Daigle, surintendant de l’Industrie Laitière. Des pièces comiques furent exécutés avec perfection et amusèrent fort les auditeurs. Les discours furent prononcés comme entr’actes. Le premier orateur fut l’hon. M. LaBillois, M. P. P., ministre de l’agriculture, qui tint l’auditoire sous le charme de sa parole durant près d'une heure. Il parla longuement des actes héroïques de nos ancêtres, puis en homme pratique il finit son discours en rappelant aux Acadiens qu’on ne pouvait songer à ne vivre que de souvenirs, mais qu’il fallait songer à l’avenir et travailler à faire cet avenir aussi brillant que possible; qu’il ne fallait pas avoir honte de parler la langue de nos ancêtres, qu’il fallait conserver cette belle langue, mais qu’il était utile aussi de savoir parler la langue anglaise vu nos relations avec les anglo-saxons. M. le ministre n’entrevoit pour les Acadiens un avenir brillant que si l’on imite les provinces de Québec et d’Ontario, que si l’on remplace l’industrie du bois et du poisson par l’industrie laitière, attendu que le bois et le poisson sont à la veille de nous faire défaut. L’hon. M. LaBillois annonce aussi avec plasir que le programme de l’exposition provincial qui sera tenue à St Jean, a subi des modifications, que le gouvernement a décidé à sa dernière session d’accorder des prix par comté afin d’engager les cultivateurs de chaque comté de prendre part à cette exposition, attendu que les comtés ne sont pas également avancés en agriculture et ne jouissent pas tout à fait du même climat. M. le ministre termine son discours au milieu des applaudissements. Le deuxième orateur fut le Dr. Grignon, qui félicita les cultivateurs de Rogersville sur leur esprit d’entreprise. En songeant, dit le docteur, qu’aux lieu et place d’une forêt quasi impénétrable que l’on remarquait ici il y a 25 ans, on y voit une jolie, même très jolie église, une belle résidence curiale, 6 ou 7 magasins, 3 grands hôtels, une gare, une magnifique école, une très grande beurrerie avec une salle […] que spacieuse, environ 400 familles de cultivateurs acadiens parlant très bien les deux langues, en songeant à tout cela, dis-je, je me surprends à regretter de ne pas voir ici tous les détracteurs de la race française, qui nous traite de race inférieure seulement pour avoir le plaisir de nous insulter.