2e Convention nationale des Acadiens

Année
1884
Mois
8
Jour
21
Titre de l'article
2e Convention nationale des Acadiens
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2, 3
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2e CONVENTION NATIONALE DES ACADIENS Le 15 août 1884 fera époque dans les annales du peuple Acadien : ce sera l’une des dates les plus mémorables qui auront marqué la renaissance de cette race martyrs. Notre seconde convention générale, un instant menacée, a eu lieu au jour et à l’endroit fixés; coïncidant avec la célébration de la fête nationale établie il y a trois ans, elle a attiré à Miscouche une grande foule d’Acadiens venus de tous les coins des provinces maritimes et plusieurs étrangers. Plus de la moitié des délégués s’étaient rendus à Miscouche pour le 14 afin de prendre part aux travaux des commissions, lesquelles, toutefois, n’ont pu, excepté celle de la langue et de l’éducation françaises, accomplir leur œuvre que dans la soirée. Les commissions ont siégé dans les salles du couvent de Miscouche, généreusement mises à la disposition de la convention par les Religieuses de la Congrégation de Notre-Dame. Disons de suite que les mesures prises par M. le curé de Miscouche et ses paroissiens pour recevoir les gens ne laissaient rien à désirer. Franche hospitalité, accueil cordial, prévenance empressée, on se sentait à l’aise partout. A l’arrivée du vapeur à Summerside, mercredi et jeudi, des convois spéciaux transportaient les passagers à Miscouche, où l’on arrivait à temps pour prendre le souper sous les tentes érigées à peu près à mi-chemin entre la gare et l’église, le service des tables était très-bien organisé, et les dames méritent des éloges pour le succès avec lequel elles ont rempli la tâche. De fréquentes averses ont interrompu le pique nique qui a eu lieu le 14, et l’on avait lieu de craindre pour le succès du lendemain. Ces craintes ne se réalisèrent point, car jamais soleil plus radieux n’a lui sur un jour de fête. Aussi dès sept heures du matin les abords de l’église étaient-ils déjà remplis d’une foule immense, en habits de fête, le sourire sur les lèvres, la figure rayonnante, le regard animé. Le temple de la paroisse allait être trop petit pour contenir la dixième partie de la multitude. Un autel fut érigé à la porte de l’église sous un dais de verdure, et les Religieuses du couvent se chargèrent d’exécuter les décors. Un espace suffisant fut réservé en face de l’autel pour les membres du clergé présents, les membres du comité exécutif et les délégués, les membres du corps de musique et le prix chœur paroissial. CLERGÉ. Les membres du clergé présents étaient : M. l’abbé Chs. Boudreault, curé de Hâvre-aux-maisons, Iles Madeleine, M. l’abbé M. F. Richard, curé de Saint-Louis, M. l’abbé A. Trudelle, curé de Palmer Road, I. P. E., M. l’abbé N. C. A. Boudreault, curé de Miscouche, M. l’abbé J. Chiasson, curé d’Indian River, I. P. E., M. l’abbé Stanislas Boudreault, curé de St-Jacques, I. P. E., Le Révd. A. D. Cormier du Collège St-Joseph de Memramcook, M. l’abbé J. Hébert, curé de St-Paul, Kent, Le Révd. Père André T. Bourque, du Collège St-Joseph de Memramcook, M. l’abbé F. X. Cinq-Mars, curé de la paroisse Acadienne de St. Alexis de Métapélia, dans le comté de Bonaventure, P. Q. M. l’abbé Doyle, curé de Summerside, M. l’abbé Phélan, du collège St-Dunstan, Charlottetown, M. l’abbé Gallant, du collège St-Dunstan, M. l’abbé Grant, Charlottetown. COMITÉ EXÉCUTIF : Etaient présents : L’hon. P. A. Landry, président, l’hon. Jos. O. Arsenault, vice-président, M. Pascal Poirier, M. Rémi Benoit, d’Arichat, M. N. A. Landry, de Bathurst, le Dr. F. Gaudet, de Météghan, le Dr. A. P. Landry, de Richibouctou, M. Blanchard, avocat, de Charlottetown, M. Ed. Girouard, avocat, Moncton, M. Olivier LeBlanc, M. P. P., Ste-Marie, M. A. Renaud, ex M. P., Bouctouche, le shérif Girouard, Richibouctou, le Dr. L. J. Bellivau, Shédiac, etc., etc. DÉLÉGUÉS Les délégués présents étaient : ILE DU PRINCE-EDOUARD. Rustico– Joseph Gallant, Félix E Buote, Maurice Martin. Hope River– Georges Buote, Moise Martin, Pierre Leclerc. New-Glasgowe– Dominique Pineau, Robert Pineau. Mont Carmel – Amable Gallant, Elisée B Gallant, Firmin E Gallant, Frs Gallant. Saint-Jacques– Sylvain E Gallant, Amant Gallant, Marc F Arseneau, Jean O Arseneau. NOUVELLE ECOSSE. Arichat– Rémi Benoit. Meteghan– Dr F Gaudet. NOUVEAU-BRUNSWICK. Saint-Louis–Pierre Maillet, Pierre L. Richard, Cyprien Gallant, Hilaire Babineau, Michel Vautour. Saint-Ignace– Frs M. Richard, Frs Maillet, Jos. L. Richard, Duc R. Richard, Hyppolite Vautour. Saint-Charles–Thos P. Daigle, Urbain Arseneau, Pierre Daigle, Olivier Chavari. Saint-Paul– Jos. Bernard, Jos. C. Arseneau, Urbain Breau, Phillipe M. Légère, David M. Légère. Fox Creek–Sévère Légère, Evartate Leonne. Acadieville– Pacifique Daigle, Jean Doiron, Némoire Pineau. Bathurst– N. A. Landry. Grande-Digue–Jude Bourgeois, Ferd. S. Gallant, Léon Poirier, Wilfred Haché, Jean J Bourgeois. Shippagan– E. Degrice. Barachois– Hyppolite Robichaud, Clément Doiron. Richibouctou– Dosithée Riebard, Ant Girouard, shérif, Jean David, Dr A P Landry, Cyrille Comeau. Sainte-Marie–Phillipe Richard, Docité R Allain. Saint-Norbert–Jean Richard, Damien Maillet, Luc Richard, Docité Maillet. Moncton– Ed Girouard, Siméon D’Cormier, Thomas Babin. Cap-Pelé–Pacifique P. Leblanc, Simon S Bonnevie, Frs Comeau. Rogersville– Zozime Arseneau, Michel Savoie, Ambroise Arseneau, Isidore Johnson, Urbain S Cormier. Bouctouche– A Renaud, Venant Bourque, Léon Allain, Thomas Jaillet, Dom J Robichaud, Dr J B Lamothe. Sainte-Anne– Maximin Leblanc, Martin Nolan. Saint-Antoine– Magloire B Légère, Narci T Leblanc. Poquemouche– Frs X Robichaud, Alexis Landry. Saint-Aloisius– Denis Daigle. Memramcook– Pierre S Leblanc, Joseph Belliveau, Max F Richard. Shédiac– C H Galland, Laurent D Boudreau, Edouard S Babineau, Ans M Légère, André M Poirier. De quatre à cinq mille personnes se pressaient sur le carré de l’église lors que commença à neuf heures et demie, le Saint-Sacrifice de la messe, offert par le doyeu des prêtres acadiens, M. l’abbé Charles Boudreault, des Iles Madeleine. Spectacle attendrissant, tableau imposant, que celui de l’élite d’un peuple, agenouillée aux pieds de l’autel et implorant la Reine du Ciel, sa patronne, au jour de sa fête et de son congrès national! C’est surtout en pareille occasion que la splendeur du culte est frappante et que la divinité de la foi catholique s’impose aux esprits. Le chœur de Miscouche, composé d’environ vingt voix–hommes et femmes–exécuta à perfection une messe en musique–celle de Peters–sous la direction d’une religieuse du couvent, aidée de Mlle Léonore Bourque, qui présidait à l’orgue. À l’offertoire, le chœur chanta l’Ave Maria de Lambildotte. Le corps de musique du collège Saint-Joseph fit entendre plusieurs morceaux appropriés à la circonstance. Après la messe, le Révd. Père A. D. Cormier, du collège St-Joseph, prononça le sermon de circonstance. Prenant pour texte ces paroles : Beatis populus cujus Dominus Deus ejus, le prédicateur–invité à la dernière heure–n’eut qu’à laisser parler son cœur pour être éloquent. La foi, qui a été le bouclier du peuple acadien dans ses luttes passées, sera toujours le point d’appui de sa nationalité. Pour conserver celle-ci, il faut être fidèle à la première. Tel a été le thème de l’éloquente improvisation du Savant Père, dont nous donnerons une analyse dans notre numéro prochain. Après la messe on se sépara pour le dîner. A une heure du haut d’une [illisible] à cette fin le président ouvrit les travaux de la convention dans un admirable discours qui frappa tous les esprits par la justesse de ses observations. Il nous serait impossible aujourd’hui de reproduire les morceaux d’éloquence et les discours patriotiques que nous avons entendus. Nos lecteurs voudront bien prendre patience, nous les leurs fournirons au fur et à mesure que l’espace nous le permettra. La convention a dû siéger le soir, dans la salle du couvent, pour élire les officiers du prochain congrès, qu’il a été décidé de tenir à la Nouvelle-Ecosse. L’hon. M. Landry a été réélu président à l’unanimité; l’hon. Isidore Leblanc, d’Arichat, et M. Urbain Doucet, de la Rivière Meteghan, ont été choisis pour vice-présidents, et M. Pascal Poirier pour secrétaire. Un vote de remerciements pour ses labeurs passés et de condoléances à l’occasion de sa maladie, a été passé à M. G. A. Girouard, secrétaire de la première et seconde convention. Sur proposition du Dr. L. J. Bellivau, les remerciements les plus chaleureux de la convention ont été votés aux directeurs de l’Intercolonial, du chemin de fer de l’Ile et de la compagnie de navigation à vapeur, pour les prix réduits et les avantages qu’ils ont accordé aux membres de la convention. Au moment où les délégués allaient se séparer, M. l’abbé Richard annonce qu’il est en mesure de leur faire voir un échantillon du drapeau national adopté par la convention. Des hourrahs frénétiques accueillent cette proposition. M. Richard et le Père Cormier déploient, par un silence solennel, devant un auditoire ému, un superbe drapeau tricolore orné de l’étoile aux couleurs pontificales. L’enthousiasme est universel, de bruyantes acclamations saluent l’étendard national que l’on voit pour la première fois. De toutes parts on demande une chanson, les uns suggérant la Marseillaise, lorsque M. Richard entonne d’une voix grave et solennelle l’Ave Maris Stella que tout le monde répète après lui. C’était un spectacle admirable, saisissant. Le God Save the Queen succède à l’Ave Maris Stella, puis M. Richard, prenant la parole, exprime l’espoir que nos musiciens nous donneront bientôt un air national. M. Pascal Poirier, interrompant M. l’abbé Richard, demande la parole pour quelques instants. Plus que tous les autres il est agité. D’une voix frémissante d’émotion, il nous annonce que pour lui l’air national des Acadiens est tout trouvé, et trouvé d’une manière extraordinaire qui dénote le doigt de Dieu, le doigt de Marie notre patronne. Cet air que nous cherchions, que nous implorions, il vient de retentir à nos oreilles, il vient d’éveiller dans nos cœurs les plus douces et les plus suaves sensations. C’est l’air entonné par M. l’abbé Richard, répété par toute l’assistance, c’est l’air de l’Ave Maris Stella, qui se chante dans toutes nos églises et que l’on entend si souvent dans nos chaumières. A ce moment des transports d’allégresse éclatent sur tous les figures, tous les cœurs battent bien haut dans les poitrines. M. Poirier avait frappé juste et sa parole éloquente et enflammée avait porté la conviction dans tous les esprits, embrasé tous les cœurs. M. l’abbé Richard, M. Landry, M. l’abbé Hébert, M. Olivier Leblanc, se lèvent tour à tour pour exprimer les sentiments qui se pressent dans leur âme. Ce fut un concours de patriotisme, d’enthousiasme permanent de sentiments aussi remarquables par l’élévation que par la justesse. Le président soumit la proposition à l’assemblée qui l’adopta au bruit des acclamations enthousiastes de la délégation. On chanta de nouveau l’air désormais national de l’Ave Maris Stella; jamais hymne ne fut chanté avec plus d’entrain. C’est là un faible aperçu de la scène la plus mémorable de la 2de Convention Acadienne, et ce n’est pas trop avancer que de dire que le souvenir en restera à jamais gravé dans l’esprit de tous ceux qui ont eu la bonne fortune d’en être témoins. Nous ne craignons pas de le dire, aucun peuple n’a assisté à spectacle plus saisissant d’émotion, et la France elle-même, ce foyer ardent de foi, n’a probablement jamais applaudi à des sentiments plus nobles ou mieux exprimés que ceux énoncés par nos orateurs à la séance de vendredi soir. Le drapeau acadien a été hissé, pour la première fois, en face de l’église de Miscouche, samedi matin. C’est l’honorable M. Landry qui a présidé à la cérémonie. Comme il se déployait à la brise, M. le curé de Miscouche le salue d’une fusillade dont l’écho se répercuta dans la plaine, au milieu des vivats enthousiastes des habitants de Miscouche et de leurs hôtes. –Grâce à l’obligeance du capitaine du St Lawrence,–le vapeur qui ramenait la plus part des excursionnistes samedi,–les Acadiens ont eu le bonheur de voir flotter leur drapeau à l’ombre du drapeau britannique pendant la traversée. Tous les délégués s’étant réunis sur le pont, firent venir le capt. Evans et lui exprimèrent par la bouche de leur président, de vifs remerciements, pour sa bienveillance et ses égards envers les délégués. Charmé de cette démonstration, le capitaine Evans n’eut que de bonnes paroles à l’adresse des Acadiens. Pendant la traversée, M. Pascal Poirier proposa des félicitations à l’adresse des musiciens du collège et de vifs remerciements du Très Révd. Père Lefebvre pour avoir prêté le concours de son corps de musique. Le père A. D. Cormier répondit en termes heureux comme il sait toujours le faire, et assura l’auditoire des sympathiques du collège et de son supérieur pour la cause acadienne. Le shérif Girouard se chargea de faire une collecte pour le corps de musique auquel il remit une quinzaine de piastres. Une douzaine de passagers furent appelés à prendre la parole. Tous s’acquittèrent à merveille de leur tâche. A la convention le président a donné lecture de plusieurs dépêches reçues le jour même. Ces dépêches, que nous donnons ci-après, ont été vivement accalmées : Wentworth, N. E. 15 août 1884. A P. A. Landry, Miscouche,– Les Acadiens de la paroisse de Saint-Bernard, comté de Digby, N. E. saluent les Acadiens-français réunis en convention à Miscouche et leur souhaitent succès. Augustin Melanson, Charle Leblanc, Lambert Belliveau, Saturin Gaudet, Ambroise Thériault, Chs Comeau, Thos Aubrou, Laurent Albert, Pierre Doucet, Pierre Blain, Hillaire Thériault, Théophile Gaudet, Phillipe d’Entremont, J. B. Doucet, Gabriel Saulnier, Seraphin ------, James Buckley, Benjamin Thériault, Ambrose Leblanc, Martin Belliveau, Léonard Cottereau, Antime Doucet, Louis Comeau, Edouard Belliveau, Joseph Thériault, Rémi Comeau Urbain Belliveau, Louis Amirault, O. A. Soucle. Weymouth, N. E. A P. A. Landry, président de la convention de Miscouche : Les sousignés, au nom de la population de Saulnierville et de Meteghan, saluent leurs frères acadiens-français et leur souhaitent succès. Maximin C Comeau, Ambroise E Duffy, Jean E Comeau, Daniel Leblanc, Hilaire Leblanc, S Bauin, P Leblanc, Jean Blain, Pierre Dugas, Chs Leblanc, Max Lellane, Jean F Leblanc, Frédéric Belliveau, A M Comeau, Pierre Belleau, A M Comeau, Max Comeau, Jean B Dugas, Sévéric Leblanc, Céleste Leblanc. A P. A. Landry, Miscouche :– Les Acadiens de la paroisse Sainte-Marie, comté de Digby, N.E., saluent leurs frères les Acadiens-français réunis à Miscouche, et leur souhaitent joie et succès. F. Vautour, Benjamin Melanson, Pierre Bourgeois, Francis Bourgeois. 15 août 1884. Charlottetown, 13 août 1884. A J. O. Arsenault, Miscouche : – Suis excessivement chagrin de ne pouvoir assister à votre réunion aujourd’hui. Transmettez au peuple acadien ma plus chaude sympathie dans sa grande réunion nationale. DONALD FERGUSON Ottawa, 14 août 1881. A l’hon. P. A. Landry, Miscouche :– Mon départ pour le Nord-Ouest m’empêche de me joindre à nos amis les Acadiens. Je vous souhaite à tous union, prospérité et succès en tout. M. L. LANGEVIN On a remarqué l’absence de délégués de la grande paroisse de Tignish. A l’instigation de l’hon. S. F. Poirier, cette paroisse s’est obtenue de figurer à ce congrès, où elle devait occuper une des premières places. C’est déplorable et plusieurs orateurs, notamment M. le président, ont exprimé les regrets universels que cette abstention faisait naître.