La Fête National à Rogersville

Year
1909
Month
9
Day
16
Article Title
La Fête National à Rogersville
Author
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Page Number
02
Article Type
Language
Article Contents
La Fête National à Rogersville Au matin de l’Assomption, les membres de la succursale St-François de Sales, assistent à une messe célébrée par le Révérend Docteur Gauthier, curé de Palmer Road, I. P. E., au cours de laquelle tous communient en corps et en insignes. A 9½ h. l’église est trop petite pour contenir la foule des fidèles, venus de toutes les paroisses voisines, voire même de Chatham et de Newcastle. Le R. P. Hippolyte, Trappiste, nouvellement ordonné, fait son entrée solennelle au chœur assisté de deux de ses frères du Calvaire, les RR. PP. Timothée et Humbert. Le Saint Sacrifice commence, tous les cœurs se tournent vers ce jeune prêtre, qui, pour la première fois, vient offrir la Sainte Victime dans l’église paroissiale. Après l’Evangile, Mgr Richard offre au nouveau prêtre ses vœux personnels et ceux de la paroisse, puis adresse la parole en anglais aux fidèles pour leur expliquer le sens de la fête du jour. Le R. P. Gauthier lui succède dans la chaire sacrée, où pendant plus d’une demi heure, il nous tient sous le charme de sa parole. Tour à tour l’orateur nous montre, avec la clarté qui le distingue, ce qu’est le patriotisme, la noblesse de ce sentiment, l’exemple que nous a donné N. S. lui-même et enfin ce qu’il doit être pour l’Acadien. Il insiste surtout sur la conservation intacte de la foi et de la belle langue française, et invite avec instance ses compatriotes à favoriser même au prix des sacrifices les plus réels, l’éducation et l’instruction supérieure de leurs enfants dans les collèges dont l’Acadie s’honore et se glorifie. Vers les 3 heures, un joyeux carillon ramène les fidèles à l’église. Aussitôt après les vêpres la procession s’organise grandiose, recueillie; chaque société précédée de sa bannière et suivie des enfants portant des pavillons aux couleurs nationales. Au chant de l’Ave Maris Stella la procession s’avance, contournant la propriété des Missionnaires Eudistes. Au retour on s’arrête sur le terrain paroissial, vis-à-vis de l’église. C’est le moment des discours. Sur une large estrade prennent place les différents orateurs encadrés par les bannières et les étendards. Mgr Richard prend le premier la parole pour redire le vrai sens de cette fête nationale que les Acadiens se choisirent à leur convention de 1881. Puis, faisant allusion à la Société Mutuelle de l’Assomption, il recommande à ses membres de rester toujours unis et d’écarter de leur société toute question politique. Vient ensuite l’orateur du matin qui s’est déjà conquis-tous les cœurs. Il avoue, le bon Père, que depuis son arrivée à Rogersville l’émotion l’a gagné. A la vue de ce nouveau terrain conquis à la patrie acadienne, de cette immense et belle paroisse de Rogersville…. Il a pleuré. Puis se tournant vers celui qui en est le fondateur – Mgr Richard – il le félicite de son œuvre et le remercie au nom de l’Acadie tout entière, saluant en lui un chef que tous vénérent et admirent. Aussi, adjure-t-il les gens de rester sur leurs terres, de conquérir de plus en plus du terrain à la patrie; en agissant ainsi ils feront acte du plus pur patriotisme. Le Révérend Père Dutour, curé d’Acadieville, est appelé ensuite à prendre la parole. Bon nombre de ses paroissiens sont là qui connaissent son éloquence. Sa voix est d’autant plus écoutée que c’est une voix canadienne, une voix des frères de là bas, qui, dit-il, s’ils ont eu à souffrir et à combattre, n’ont pas eu la douleur de se voir exilés loin de la Patrie. Puis rappelant les services que le Canada, en particulier son clergé, a rendus à l’Acadie, il souhaite que tout en restant indépendants l’un et l’autre, une union plus istime se fasse entre ces deux peuples qui ont pour commune origine la vieille France des rois. Mais, ce n’était pas assez, il manquait quelque chose à ce concert de voix chantant l’Acadie en ce jour solennel. Voici, qu’à moitié contraint par l’obéissance, le bon Père Timothée, Trappiste, ancien missionnaire, nous raconte au milieu de l’émotion générale les adieux de la vieille mère il y a 6 ans, montrant comment Dieu sait tirer le bien du mal et que la persécution qui sévit en France a été une des causes du relèvement de la Patrie acadienne. C’est chassés de France que les Eudistes sont venus diriger les collèges de Church Point et de Caraquet; c’est dans l’attente de l’expulsion qu’il est venu lui et ses frères fonder la Trappe de Rogersville. C’est la persécution qui a relevé l’Acadie, c’est elle qui a fait Rogersville, c’est elle qui relèvera la France par l’union des forces catholiques. En terminant, le Père fait des vœux pour la prospérité de l’Acadie, au nom de ses frères, de ses sœurs les Religieuses Cisterciennes, de toutes communautés françaises de la paroisse, promettant de se dévouer corps et âme aux œuvres que la Providence leur a confiées sur la terre acadienne. Les discours achevés, on rentre à l’église où la Bénédiction Solennelle du Saint Sacrement clôture cette journée toute animée de la foi la plus vive et la patriotisme le plus pur.