Dalhousie

Year
1909
Month
8
Day
26
Article Title
Dalhousie
Author
----
Page Number
08
Article Type
Language
Article Contents
DALHOUSIE Le 15 août, notre ville était en joie. Partout flottait le drapeau tricolore français, agrémenté, dans le bleu, d’une étoile aux couleurs papales. C’était pour la première fois que les membres de la succursale de l’Assomption de notre ville se réjouissaient le jour de leur fête nationale. Dès l’aurore, les Acadiens de Charlo, Eel River, Dundee, Campbellton, arrivaient à Dalhousie, ainsi qu’un nombreux clergé et l’hon. D. V. Landry, ministre de l’Agriculture dans le cabinet provincial du Nouveau-Brunswick, et autres. A dix heures, dans la belle église paroissiale, splendidement ornementée pour la circonstance, il y eut grand’messe solennelle, rehaussé de beaux chants. Dans son sermon, le Père Cormier se surpassa en éloquence et montra comment les Acadiens, après avoir été persécutés sont demeurés forts par leur dévotion à Marie. A la communion tous les membres s’approchèrent de la sainte table. A deux heures, prirent place, sur une estrade élevée pour la circonstance, près de l’église. M. J. A. LeBlanc, président de l’association locale, les Révds Père A. A. Boucher, chapelain et curé de Dalhousie, Cormier, Lambert, Melançon, D’Amours, les hons. Landry et LaBillois, MM. Montgomery, maire de Dalhousie, O. M. Melanson, ancien député, de Shédiac, LeBlanc, avocat, de Campbellton, Dr Doucet, et autres dignitaires de l’association. Ce fut Son Honneur le maire Montgomery qui commença les discours, en souhaitant la bienvenue à tous, rappelant qu’il y a quelques années les Acadiens étaient peu nombreux à Dalhousie : leur nombre a augmenté, grâce à nos industries. Le Père A. A. Boucher, notre digne et vénéré curé, rappela les pénibles moments qu’il endura, il y a 24 ans, et les obstacles qu’il vainquait par sa tenacité. J’ai lutté, dit-il, pour la belle langue française et le mouvement français. Aujourd’hui je suis heureux : nos enfants parlent le doux langage de France, la langue de notre cœur, et nous avons des pères chrétiens, des mère chrétiennes. Il termina par cette péroraison poignante : “Les échos des montagnes ont entendu les canons de la France, nous restons français, la France vit au fond de nos cœurs!” M. LeBlanc, avocat, de Cambellton, évoque dans un langage chatié tous les maux supportés par les Acadiens. Le choix de l’Assomption par les Acadiens au lieu de la Saint-Jean-Baptiste, comme fête nationale, a été mal compris, dit-il. Les Acadiens ont la même histoire, la même origine, les mêmes destinées que les Canadiens-Français. Les Acadiens, pauvres, persécutés, ont triomphé. Pour se réjouir, ils ont choisi le 15 août, jour de l’Assomption, mais les Acadiens restent unis avec leurs frères canadiens-français pour la conservation de la langue française, tout en demeurant loyaux à la couronne britannique. M. l’abbé Melanson, curé de Balmoral, dans un discours plein d’à-propos, énumère les luttes de nos ancêtres, ces héros chrétiens. Dans une envolée patriotique, il dit : “Restons français, parlons notre langue, que les pères et les mères la fassent parler à leurs enfants.” Il invite les assomptionnistes à venir l’an prochain dans sa paroisse catholique et française. Il est regrettable d’être forcé de résumer le magistral discours de l’hon. D. V. Landry, ministre de l’agriculture du Nouveau-Brunswick. “Nous avons été émus, ce matin, dit-il, en voyant cette communion générale des hommes de nos sociétés de bienfaisance”. Lui aussi donne les raisons qui ont déterminé les Acadiens à chômer leur fête le jour de l’Assomption, et dans un mouvement superbe, il ajoute : “Montrons-nous dignes de nos ancêtres. Ayons le courage de réclamer nos droits, tout en restant unis avec nos frères canadiens-français, en travaillant pour notre nationalité commune.” M. O. M. Melanson, ancien député de Shédiac, a quitté ses concitoyens qui chôment l’Assomption par des fêtes grandioses, pour venir saluer ses frères acadiens du comté de Restigouche. Le Révérend D’Amours, curé de Dundee, a dit quelques mots très aimables sur la grande fête acadienne. Le Révérend Père Cormier, après un discours plein de gaiété et d’esprit, déclare qu’il ne fait ne fait pas de distinction entre un Canadien-français et un Acadien, car les Acadiens savent que les Canadiens-français de la province de Québec seront toujours prêts à défendre leurs frères acadiens. “Oui, ajoute-t-il, parlons cette belle langue française, la langue de nos ancêtres, car tout acadien qui ne parle pas français est un renégat!” L’hon. M. LaBillois, ancien ministre des travaux publics, député du comté de Restigouche, habitant Dalhousie, fit de judicieuses remarques. “Ce matin, dit-il, lorsque j’entendis ce beau chant dans notre église, je me retrouvai dans la province de Québec. On nous dit : vous parlez un français mélangé, nous le confessons, mais mieux vaut le parler mélangé que de ne point le parler du tout. Je souhaite cependant que nous nous corrigions. Pour y parvenir, je demande que les journaux français soient lus dans nos familles acadiennes et canadiennes-françaises. Et posant la question : Quelle doit être le résultat de cette fête? il y répond ainsi : lire les journaux français dans nos familles, et le temps étant venu, pour la prospérité de tous, encourager l’agriculture et la colonisation. Dans cette œuvre patriotique, repose l’avenir de la province du Nouveau-Brunswick. Le gouvernement provincial actuel peut compter sur l’approbation de l’opposition de la Chambre sur ce point. La fête se termina par le chant national acadien “Ave, Maris Stella”. Et chacun s’en retourna chez lui, jetant un regard ému sur le noble tricolore, étendard des Acadiens heureux et fiers d’être les descendants de vaillants chrétiens français.