Eclaircissements sur la question acadienne: le sermeet d'allegeance (suite)

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Year
1888
Month
10
Day
31
Article Title
Eclaircissements sur la question acadienne: le sermeet d'allegeance (suite)
Author
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Page Number
3
Article Type
Language
Article Contents
ECLAIRCISSEMENTS SUR LA QUESTION ACADIENNE Le serment d’allegeance (Suite) Les paisibles Acadiens n’en étaient pas venus à ces énergiques protestations sans avoir été provoqués pendant longtemps et sans avoir longtemps patienté. Un de leurs prêtres, entre autres, l’abbé Gaulin, vieillard vénérable, blanchi dans les missions sauvages, où il n’avait eu souvent, écrivait-il lui-même, pour toute nourriture, que les coquillages de la mer, l’abbé Gaulin n’avait été arraché de prison, où le tenait Armstrong, et restitué à ses paroissiens les habitants des Mines que parce que ce gouverneur espérait calmer par là l’irritation de ces habitants, et les amener à prêter serment. 1 Mais cela n’était rien comparé aux avanies et aux persécutions qu’eut à endurer l’abbé de Breslay, l’un des curés de Port Royal. Armstrong l’insulta jusque dans l’église, pendant qu’il y remplissait les fonctions sacrées et fit fouetter des habitants pour les forcer à déposer contre lui. Il fit piller sa maison, rompre ses portes, vendre ses bestiaux, dont il garda le profit pour lui-même. Plusieurs fois il attenta à sa vie. Enfin il l’obligea, par ses violences et ses poursuites, à aller se cacher au fond des bois durant plus de quatorze mois. L’abbé de Breslay ne vit d’autre moyen de se protéger que de porter ses plaintes en Angleterre, où le gouverneur dut aller en personne se défendre. L’accusation la plus grave portée contre l’abbé de Breslay était de s’être mêlé des affaires du gouvernement. Mais il y répondit de la manière la plus triomphante en produisant des certificats du général Philipps lui-même et de M. Cosby, président du Conseil de la Nouvelle-Ecosse, attestant que le leur pleine connaissance et de celle des habitants, tant anglais que français, l’abbé de Breslay s’était bien comporté en toute occasion. Certains gouverneurs avant Armstrongs avaient voulu forcer les Acadiens à rejeter l’autorité de l’Evêque de Quebec de qui ils relevaient et à violer par là les règles les plus élémentaires de la hiérarchie catholique. J’ai déjà dit ailleurs que quelques-uns de ces gouverneurs avaient même voulu imposer des lois aux missionnaires jusque dans l’administration des sacrements de l’Eglise. Ainsi, par exemple, le gouverneur Mascarène écrivit des lettres de menances à l’abbé Desenclaves, parce qu’il avait refusé l’absolution à des individus qui refusaient de faire les restitutions auxquelles ils étaient obligés. Cet abus d’autorité n’est pas le seul qu’on puisse reprocher à Mascarène; il suffit toutefois pour démontrer que, si ce gouverneur ne se laissa pas entraîner aux excès dont s’était rendu coupable l’énergumène qui l’avait précédé, son administration ne fut cependant pas exempte de graves infractions à la liberté religieuse. Mais ce qui était plus alarmant que tout le reste, et ce qui faisait croire aux Acadiens aussi bien qu’à leurs prêtres que leur foi était en danger, c’étaient les tentatives de perversion faites parmi eux dans la persuasion où étaient les gouvernants que c’était le seul moyen d’en faire de bon sujets. (Sic.) “Les Anglais, dit le mémoire déjà cité, ont une application particulière pour les séduire par leurs discours et leurs conversations, par des écrits imprimés ou manuscrits qu’ils répandent parmi eux ou qu’ils leur prêtent à lire, par des objections continuelles qu’ils leur font sur la religion. Les missionnaires eux-mêmes sont quelquefois attaqués attaqués par les ministres, soit en disputes verbales ou par des écrits. “Ce n’est pas tout, ils emploient même contre eux en haine de la religion les vexations et les persécutions.” Telle était la situation des Acadiens au point de vue religieux. Et pourtant le libre exercise de culte catholique leur avait été garanti par les traités; pourtant les gouverneurs avaient engagé leur parole, à maintes reprises, qu’ils respecteraient cette garantie. Jetons maintenant un coup d’œil en arrière et voyons ce qui ressort des faits que nous venons de raconter. Il est établi et prouvé par dès témoignages aussi nombreux qu’irrécusables, que le traité d’Utrecht a été ouvertement violé, et que la terre de la reine Anne n’a jamais été exécutée, et cela uniquement par la faute et la mauvaise volonté bien arrêtée des gouverneurs de la Nouvelle-Ecosse. Il est clairement prouvé que le général Nicholson a empêché, par tous les moyens possible, les Acadiens d’évacuer la province, malgré leur volonté bien formelle et leurs protestations écrites et signées par tous les chefs de famille, en présence des représentants de la France; que le même général Nicholson, dans le but de retenir les Acadiens, les a empêchés de vendre leurs terres et d’emporter leurs effets; qu’il a fait saisir les embarcations qu’ils avaient construites; qu’il a interdit l’entrée des ports aux navires français destinées à apporter les agrès demandés par les Acadiens; que même ce gouverneur a été jusqu’à défendre à ceux-ci d’en faire venir de Boston. Il est prouvé non moins clairement que les successeurs de Nicholson, Vetch, Caulfield, Doucet, Philipps durant sa seconde administration, Armstrong, et Philipps durant sa seconde administration, ont également empêché obstinément et sans interruption les Acadiens de quitter la Nouvelle-Ecosse, en leur défendant de vendre leurs terres et d’emporter leurs effets. (A suivre)