Ou en sommes nous?

Newspaper
Year
1905
Month
10
Day
5
Article Title
Ou en sommes nous?
Author
un Acadien
Page Number
4
Article Type
Language
Article Contents
Ou en sommes nous? Si nous considérons les peuples et les empires, les individus, comme les masses au point de vue politique, moral ou social, nous ne pouvons nous empêcher de constater que la presse est comme une force motrice dans l'organisation des gouvernements et des parties politiques. La presse, toujours sur le qui-vive, ne craint pas d'attaquer les parties et de dévoiler leurs machinations et leurs défauts dans l'administration des affaires publiques. Il n'hésite pas à réclamer les droits d'un peuple, et est toujours prêt à combattre pour faire respecter ses droits les plus sacrés. La mission du journaliste est une mission âpre et aride, mais en même temps elle est aussi une œuvre patriotique et digne d'encouragement. C'est en un mot une œuvre d'évangélisation : car comme la dit, Sa Sainteté Léon XIII, d'heureuse mémoire, "La presse catholique est comme l'appui et l'arc-boutant de l'Eglise puisqu'elle stimule l'œuvre mise en mouvement par Elle." Il porte ses lumières dans tous les pays civilisés; il va même jusqu'à reprouver un monarque altier et arbitraire, jusque dans les somptiueux palais des rois. Il habite sous le toit du riche comme dans la chaumière du pauvre où il répand également l'instruction, et y prodigue ses lumières et ses conseils. Il soulève les masses et les mène a son gré comme on mènerait de simples enfants. Or si la presse est si puissante, si elle joue un rôle si important dans l’organisation de la société, si elle est indispensable à l'homme d'état, au commerçant et à l'agriculteur pratique, si elle doit avoir sa place au foyer domestique, à plus juste titre devons nous l'encourager, et surtout encourager le journal à la lecture saine et solide à laquelle nous voulons initier notre jeunesse catholique. Où en sommes nous dans les provinces maritimes en fait de journalisme? Nous en sommes encore qu'à notre début et déjà on peut voir à l'horizon un nuage s'élever et grandir! Dans les Provinces Maritimes nous avons trois journaux acadiens à la lecture saine que nous ne craignons pas de placer entre les mains de nos enfants catholiques. Ces journaux se dévouent d'une manière toute particulière au progrès et à l’avancement de notre race. Le Moniteur Acadien, le doyen de nous journaux, publié à Shediac, qui depuis une trentaine d'années n'a cessé de veiller d'un œil vigilant au bien être des Acadiens. L'Evangeline, une autre vaillante feuille acadienne, publiée actuellement à Moncton travaille énergiquement pour notre avancement intellectuel, moral et social. Enfin, en dernier lieu, L'IMPARTIAL, qui, quoiqu'étant le plus jeune n'est pas le moindre de nos journaux, est publié à Tignish, I P. E. et depuis une douzaine d'années tonne d'une manière énergique pour faire respecter nos droits dans cette Province; mais qui hélas trouve très peu d'encouragement des nôtres. Il est pénible de constater qu'une population de 14000 acadiens, que nous sommes sur l'Ile du Prince Edouard, ne puisse soutenir au moins un journal français pour défendre leurs droits. Aussi, j'oserais affirmer qu'à peine si sept à huit cents de nos Acadiens de l'Ile sont abonnés à ce journal, et encore si ce nombre payait régulièrement leur abonnement, mais bien au contraire, la grosse majorité fait la sourde oreille aux justes réclamations du propriétaire, qui, lui même, par la négligence et la mauvaise volonté de ses abonnés, ne peut remplir ses obligations envers ses créanciers. Et pourtant, avec un peu de bon vouloir, et un grain de patriotisme la population acadienne de l'Ile du Prince Edouard pourrait facilement soutenir un journal français. Combien de familles françaises sur l'Ile ne reçoivent pas un seul journal français, mais ne manquent pas de s'abonner à deux et même trois journaux de langue anglaise, et remarquez-le bien, ne manquent pas de payer leur abonnement régulièrement, pour une lecture qui laisse souvent beaucoup désirer au point de vue chrétien. Oui c'est une calamité qui s'accroît quotidiennement, que ce manque de patriotisme parmi nous. Quel honte et malheur pour la population française de l'Ile si le seul journal acadien que nous possédons venait à disparaître de l'arène du journalisme. Et pourtant c'est un fait avéré qu'à moins que nous encouragions notre journal, L'IMPARTIAL qui déjà à tant fait de bien parmi nous, qu'il doit inévitablement tomber. Amis et compatriotes, de l'Ile du Prince Edouard, donnons nous la main, et mettons l'épaule à la roue pour que notre journal ne cesse pas d'exister et ne devienne une chose du passé. Abonnons nous en masse et payons nos abonnements annuellement à L'IMPARTIAL afin que ce vaillant journal continue, comme par le passé, à veiller à nos intérêts comme Acadiens et qu'il continue à défendre nos droits. Il n'est pas une famille Acadienne dans l'Ile qui ne puisse, dans le cours de l'année, sacrifier une piastre pour payer son abonnement à L'IMPARTIAL qui, lui donnera en retour une lecture saine et catholique. Il me semble que ce devrait être le devoir de nos curés acadiens, de cette province, de faire un éloquent appel à leurs paroissiens respectifs en faveur de notre journal français, et de travailler de toute leur force pour que cette œuvre patriotique et nationale continue sa mission d'instruire et de propager l'usage de la langue française dans nos paroisses acadiennes. Un Acadien Mont Carmel I.P.E Ce 28 sept 1905.