Correspondances

Year
1881
Month
4
Day
7
Article Title
Correspondances
Author
Un acadien français
Page Number
1
Article Type
Language
Article Contents
Correspondances AU REDACTEUR DU MONITEUR ACADIEN Monsieur le Rédacteur, Sachant que vous êtes toujours prêt à défendre la cause acadienne française, et que vous ne perdez jamais une occasion de revendiquer ses droits, je m’adresse à vous pour faire connaître la position des Acadiens français du comté de Gloucester. Il semble que la Providence a décrété que les Français de ce comté doivent souffrir et être persécutés. A plusieurs reprises, nous avons fait de grands efforts pour envoyer aux assemblées législatives, des hommes de notre sang et de notre langue et toujours nous avons été battus : une fois à la chambre locale nous avons réussi; mais notre homme nous abandonna bientôt pour prendre une position lucrative. En 1877, nous avons redoublé de courage et essayé de remplacer M. Anglin par un homme de notre race, et là encore nous avons été battus. Cependant, depuis une couple d’années nous reprenions courage, et nous croyions que le gouvernement conservateur avait à cœur notre avenir et notre prospérité. L’homme que nous avions choisi pour faire la lutte dans les intérêts français en même temps que conservateurs, avait été récompensé de son dévouement par l’exercice du patronage dans ce comté; et le véritable parti français, celui qui a fait la lutte et souffert dans l’intérêt du gouvernement actuel, se trouvait de temps à autre être récompensé, et le parti français commençait à prendre force dans le comté. Mais voilà qu’une affaire importante se présente, voilà que les droits de la langue française courent chance d’être respectés. Un commissaire recenseur doit être nommé dans Gloucester; nous demandons à M. Turgeon, notre avocat auprès du gouvernement depuis deux ans, de faire respecter les droits des Français, les droits de la majorité du comté. Confiants dans ses promesses, nous ne comptions plus que sur le nom et l’adresse de cet Acadien-français. Mais, à notre étonnement, c’est un Anglais qui est nommé. Où était donc M. Turgeon, lorsque les ministres s’occupaient du choix de cet officier? Pourquoi le gouvernement a-t-il nommé un homme qui n’appartient pas à la majorité? Le gouvernement veut-il nous lancer l’insulte à la figure, ou M. Turgeon a-t-il négligé de représenter nos droits, ou s’est-il compromis? nous a-t-il trahis? C’est ce que les amis ne savent expliquer. M. Turgeon possédait la confiance des Français du comté, sans compter l’appui qu’il a toujours eu de la population protestante. Une élection eût-elle eu lieu il y a un mois, M. Turgeon aurait remporté une éclatante victoire sur M. Anglin, ou tout autre candidat assez osé pour l’opposé. Il a toujours parlé de son patriotisme, et demandé l’occasion de le prouver. Le gouvernement, la chose est trop évidente pour être contestée, lui a accordé le patronage du comté. C’est donc à lui de faire valoir nos droits. Les ministres ont-ils choisi un autre homme pour être le dispensateur de leurs faveurs? Nous ne le savons. Mais les énumérateurs du comté sont les amis auxquels il avait promis ces positions. Récemment encore, un de ses protégés, a été appelé à remplir à Caraquette une position du ressort du gouvernement fédéral. M. Turgeon a donc méconnu l’importance d’un commissaire recenseur. Nous ne savons comment expliquer la chose; nous ne savons non plus qui blâmer, le gouvernement ou M. Turgeon. Soyez certain, M. le Rédacteur, que le mécontentement est grand, et que les conservateurs de Gloucester, Anglais comme Français sont dans l’étonnement, car M. Sivewright n’avait aucun droit à cette nomination. Ami fidèle de M. Burns, avant tout il a travaillé, comme ce dernier, à assurer le triomphe de M. Anglin en 1877, et comme lui, en 1878, il a entravé la nomination de tout autre candidat, lorsque son maître ne pouvait se faire élire. Tel est l’état des choses dans Gloucester, et seul Dieu sait quel sera notre avenir. Sur qui nous reposer? dans quel parti politique devons-nous avoir confiance? Nous ne pouvons plus compter que sur la force et l’influence de votre journal, et j’espère que vous ne nous abandonnerez pas, comme ont fait tous les autres. UN ACADIEN FRANÇAIS Gloucester, N.B., 28 mars 1881.