A travers le kaléidoscope de la politique provinciale

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Year
1897
Month
2
Day
25
Article Title
A travers le kaléidoscope de la politique provinciale
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Page Number
2
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A TRAVERS LE KALÉIDOSCOPE DE LA POLITIQUE PROVINCIALE. Quand un parti est au pouvoir, cela suppose naturellement que la puissance est avec ce corps, comme c’est d’ailleurs en vertu de cette supériorité qu’il occupe la droite dans les assemblées délibérantes. Mais, jamais, depuis l’ère de la confédération, n’avons-nous vu nos gouvernements aussi fermement assis, et, d’autre part, l’opposition des deux provinces, de la Nouvelle-Ecosse et du Nouveau Brunswick, aussi faible, réduite au quià de l’impuissance politique. Ici, dans la Nouvelle Ecosse, l’hon. M. Fielding a laissé à son successeur la direction d’un gouvernement qui a toutes les sympathies du peuple, voire même de toutes les classes du peuple. Et tous les comtés de la province qui sont représentés dans la droite le sont par leurs meilleurs hommes. Mais le temps l'a prouvé, inutile pour nous d’en dire davantage : ce gouvernement est, au dire de nos économistes politiques les plus en vue, le gouvernement par excellence du peuple. Dans la province sœur, nous constatons aussi que l'opposition ne se compose que d’un seul homme de mérite, si l’amour de la lutte, la ténacité devant l’ennemi, le casque comme disent les Canadiens, et une éloquence tonnante et des qualités de même nature font d’un homme ordinaire un homme extraordinaire. Mais qu’a cela ne tienne, l’opposition est toujours faible. La gauche a son général, mais où est l’armée? Voilà la situation : une bonne tête, mais le corps .... faible, frêle, impuissant. L’hon. M. Blair, aujourd’hui ministre des Chemins de fer et Canaux, a laissé de sa vigueur derrière lui; la droite est encore forte de sa force, ferme de cette fermeté admirable qui a valu à l’ancien chef l’admiration de la province tout entière. Le gouvernement du Nouveau-Brunswick est fort, plein de vie, sans morgue administrative, mais doué des grandes qualités que nous voulons aux hommes publics; c'est un gouvernement uniforme, bien composé, bien assis, fait de toutes les sympathies, représentant toutes les aspirations; c’est un gouvernement pratique et cosmopolite. Cela s’entend —tout le peuple a voix à Frédéricton. L’opposition apparemment frappée d’importance, réduite à sa plus simple expression, se montre de jour en jour moins vigoureuse. L’hon. M. Stockton se lève, étend les bras, s’agite, tempête, mais c’est en pure perte : si ce qu’il dit est grave, lui seul le croit, et, partant, son impuissance. De l’autre côté de la chambre. M. Emmerson, l’orateur le plus entraînant de la députation, lui répond ad hoc. Le Ministre des Travaux Publics est non seulement un orateur convaincant, un tribun qui fait honneur aux banquettes parlementaires, mais plein de vie, plein de feu, homme de tous les temps et de tous les lieux, il est au parlement de la province sœur le plus fort des élus du peuple. Devant l’ennemi, il est digne. Il toise son adversaire dans un rien, d’un seul coup il l’écrase; il est facilement victorieux. Dans l'opposition, la population française de la province n’est point représentée. Huit députés d’origine française figurent dans les rangs de la Droite : MM. Daigle et Bertrand,du Madawaska; l’hon. A. D. Richard, de Westmorland; Johnson et Leger, de Kent; Veniot et Paulin, de Gloucester; 1’hon. Chs. H. LaBillois, de Restigouche. Soit dit en passant que cette députation acadienne fait grandement honneur à la population française de la province, de l’opinion unanime des membres de la législature. Tous, sans exception, hommes rangés, dévoués, non sans talent, ces quelques acadiens ne sauraient être remplacés avantageusement à la chambre à celte époque de notre histoire du moins. M. Urbain Johnson qui se flatte de l'appellation de grand père de la députation acadienne, et qui mérite bien ce titre en sa qualité de doyen, est, malgré ses nombreuses luttes et le nombre grandissant de ses années, toujours plein de vie. Comme l’expérience le prouve, les Français de ce pays ne sont pas seulement de la compétence ordinaire des emplois publics; ils peuvent, dans l’occasion, se montrer à la hauteur des plus grandes circonstances, les dignes émules de leurs voisins les mieux doués. Il nous est impossible de passer en revue tous nos premiers hommes, voire même nos députés; mais comme il faut jeter le plomb en temps opportun, nous orienter un peu en vue des évènements qui peuvent surgir d’un jour à l’autre qu'il nous soit au moins permis de faire allusion aux chances dont peuvent se prévaloir quelques-uns des nôtres. On propose, par exemple, l'entrée à l’exécutif de deux des Acadiens de la présente représentation, l’un avec portefeuille, l’autre sans portefeuille. Eu égard aux circonstances, M. LaBillois, qui représente le comté de Restigouche depuis 1881, a droit de séniorité. Si l'hon. M. LaBillois accepte l’honneur d’un portefeuille, il sera impossible que le second revienne à un député du versant nord de la province. Car, admettant que cela fut possible, il ne serait pas par le fait même possible d’empêcher que la récrimination ne se fit point entendre du centre. M. Veniot, qui sait bien cela, n’opposera pas un collègue d’une autre partie de la province, et le désintéressement qu’il manifestera par son attitude même lui méritera plus que l’honneur d'un portefeuille du parti. M. Veniot est très certainement l’homme du versant septentrional de la province. Jeune, plein de vigueur, habile, beau parleur et fin diseur, et par dessus tout, un political fighter, le député de Gloucester, mérite de ces commettants et de ses compatriotes. Nous ne craignons pas de lui prédire un avenir brillant. A propos, le comté de Gloucester est très bien représenté. MM. Veniot et Sivewright sont deux hommes qui, chacun par les qualités qui les distinguent, ne se recontrent pas tous les jours comme conjoints dans la représentation d'un district, et à ce titre le comté de Gloucester à toutes les meilleures raisons de se féliciter. Dans le comté le plus important de la province, Westmorland, nous trouvons un Acadien de très grand mérite dans la personne de l’hon. A. D. Richard. L’hon. A. D. Richard est un acadien en vue depuis déjà un grand nombre d’années, et il est appelé à jour un rôle très important dans la politique de Westmorland et de la patrie. Par son éducation, il est particulièrement qualifié pour la chambre, la banquette du parlement. Mais acceptera-t-il un titre sans portefeuille dans les circonstances que nous avons décrites? Pour son plaisir, non; mais dans l’intérêt des siens, de la population acadienne dont il reste l’avocat, oui, et de grand cœur croyons-nous. Nous sommes heureux de voir nos voisins du Nouveau-Brunswick se distinguer dans le monde politique, et nous espérons que les vaillants qui se dévouent pour la patrie ne seront pas oubliés sur la liste de ses bienfaiteurs.