Le Rév. M. Richard et le Moniteur Acadien

Year
1881
Month
10
Day
6
Article Title
Le Rév. M. Richard et le Moniteur Acadien
Author
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Page Number
2
Article Type
Language
Article Contents
Le Rév. M. Richard et le Moniteur Acadien. I. Nous devons tout d’abord avouer franchement que ce n’est pas sans de vives appréhensions et une défiance prononcée que nous entreprenons la tâche de revendiquer notre position, d’exposer les motifs de notre conduite, position et conduite que dans sa lettre publiée dans notre dernière feuille, M. l’abbé M. F. Richard critique en termes trop accentués pour qu’il soit possible de se méprendre sur les sens de ses paroles. Les appréhensions et les craintes que nous éprouvons sont d’autant plus réelles et d’autant plus fondées que la moindre nuance dans l’expression de nos sentiments peut compromettre l’utilité de nos explications, comme le démontre la manière dont notre article en réponse aux attaques de M. Pascal Poirier a été apprécié par notre aimable et vénéré censeur. Ceux-là seuls qui ont passé par l’épreuve critique que nous subissons, qui ont eu l’expérience de la position délicate que nous occupons–pris qu’est le Moniteur entre les deux, entre les adversaires qui sont ses amis, mais qui souvent ne s’inquiètent guère dans quel camp tombent les boulets rouges qu’ils tirent–ceux-là seuls peuvent se faire une idée des difficultés et des épines qui émaillent notre route, des sentiments d’amertume qui nous obsèdent en voyant les candides et sincères intentions qui nous animent l’objet des plus injustes soupçons. Au moins nous sommes certains des sympathies de ceux-là. M. Richard nous fait prendre une attitude, nous prête un langage que nous n’avons pas tenu, quand il affirme que nous avons pris la responsabilité des écrits dans lesquels il n’a vu que des insultes les plus grossières à son adresse. Et pourtant nous nous sommes bien gardé d’exprimer des préférences soit pour un côté, soit pour l’autre; car nous ne voyions rien à gagner à nous lancer dans une lutte déjà trop ardente et soutenue par un nombre déjà assez considérable de combattants. Nous avions à répondre à M. Poirier, qui attaquait brutalement notre ligne de conduite, marquée pourtant au coin de la plus stricte impartialité. Sans l’ombre d’une provocation de notre part, M. Poirier nous lançait du « fossé » tout ce qu’il pouvait y ramasser de projectiles blessants et injurieux, parce que–nous ne pouvons lui supposer aucun autre prétexte–le Moniteur avait publié la satire de Bénédict, tout comme il avait publié les lettres pas trop polies de M. Poirier, tout comme il publiait sa dernière, qui n’était qu’un tissu de basses insultes à l’adresse du directeur du Moniteur et de personnes respectables qui avaient, entr’autres torts, celui de n’avoir pas tracé une seule ligne contre lui dans notre journal! « A part la boue, » il y avait des « accusations graves » dans la lettre de M. Poirier. Ainsi il nous représentait comme l’insulteur du clergé, du peuple acadien, et des principaux avocats de l’Assomption, etc. Nous lui avons expliqué qu’il divaguait, que nous n’avions fait pour Bénédict ce que nous avions dû faire pour lui, M. Richard et leurs amis. Et pour qu’il n’y eut pas de méprise à ce sujet, nous avons cité quelques passages du discours prononcé par le R. M. Richard le jour de la Saint-Louis, passages qui, dans l’interprétation que nous leur donnions, renfermaient à l’adresse des personnes « respectables et respectées » qui avaient épousé la cause de la Saint-Jean-Baptiste à la convention, une censure aussi offensante et aussi directe que tout ce que Touriste, Bénédict, XXX, etc., avaient pu écrire contre M. Richard et M. Poirier. Nous tenions à établir ce fait afin de nous disculper du crime que nous faisait M. Poirier de nous acharner contre R. M. Richard, parce que c’était un Acadien qui avait fondé un collège, ce qui pour nous est une raison de plus de faire tout en notre pouvoir pour seconder ses efforts et l’entourer de tout le prestige possible. Notre passé est là pour le prouver. Assurément, ce n’était pas là prendre la responsabilité des injures personnelles faites au R. M. Richard; ce n’était pas nous déclarer contre lui. Notre vénérable critique nous dit que nous avons faussé le sens de ses paroles et ne nous reconnaît pas le droit « d’interpréter ses écrits ou ses paroles suivant notre gré et d’en tirer les conclusions que nos préjugés nous suggèrent. » De préjugés nous ne savons pas le premier mot; ils nous sont parfaitement étrangers, surtout en ce qui concerne le R. M. Richard. Nous avons interprété les passages en question dans le sens qu’ils présentaient, et il se trouve qu’en cela nous avons été d’accord avec le public en général, et que notre interprétation a été partagée par les amis de M. Richard dans cette campagne, par les partisans de l’Assomption même, nous en avons des preuves écrites devant nous. L’accusation de préjugé tombe donc sans nous atteindre. Mais comme nous n’avons pas le moindre intérêt à trouver le R. M. Richard en défaut, nous sommes heureux d’accepter l’explication qu’il nous donne sur le véritable sens qu’il faut prêter à ses paroles, bien qu’il soit évident qu’on n’est guère disposé à nous tenir compte de notre bonne volonté.