Correspondance: quelques notes sur Bouctouche

Year
1890
Month
6
Day
20
Article Title
Correspondance: quelques notes sur Bouctouche
Author
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Page Number
1
Article Type
Language
Article Contents
Correspondance. QUELQUES NOTES SUR BOUCTOUCHE (suite) M. le Rédacteur, Je vais de nouveau puiser dans les manuscrits de M. Placide P. Gaudet. Voici ce que j’y trouve à propos de l’histoire de la famille Allain : La souche des Allain en Acadie est Louis Allain. Il pratiqua d’abord le cabotage avec les colonies anglaises du temps de M. de Brouillan, gouverneur de l’Acadie, 17-01-1705. Ensuite il s’associe à un nommé Naquin, et tous deux se mêlèrent à diverses entreprises coloniales et maritimes. Naquin décéda célibataire en 1706 et légua son habitation à Bélair, dans le haut de la rivière Port-Royal, à son associé. Louis-Allain possédait cependant, avant qu’il héritât de ce legs, des terres, dans les environs du fort au Port-Royal, comme le prouve l’extrait suivant d’un document fait en 1705 et intitulé : « Etat des terres à acquérir pour l’extension du fort que sa majesté a fait bâtir à Port Royal, et des maisons à démolir comme nuisibles à la fortification. » Voici ce qu’on y lit : « A M. Louis Allain : terres et maisons hors du fort à mettre en esplanade. Une pièce de terre sur la rue Saint-Antoine en descendant vers la rivière Dauphin, soixante pieds de long sur la dite rue, vingt-un mille cent soixante pieds carrés, 178 livres; une maison sise sur la dite rue (côtée sur le plan 11), 900 livres. » « Le recensement de l’Acadie, fait en 1714, nous montre qu’à cette date Louis Allain, demeurait avec sa femme, dont le nom n’est pas donné ni ceux de son garçon et de sa fille, au Cap, au Port Royal. Un autre document, fait au Port Royal, en août 1714, par MM. La Ronde Denys et De Pensens et intitulé « Liste des Chefs de Famille qui demeurent au long de la Rivière Britannique (Port-Royal) et aux environs du Fort d ‘Annapolis Royale, avec le nombre de leurs enfants, » nous indique la même chose. Il est donc évident qu’à cette date, Louis Allain n’avait que deux enfants vivants : un garçon, du nom de Pierre, et une fille, nommée Marie. S’il a eu d’autres enfants ils étaient alors décédés ou mariés si c’étaient des filles, car en 1714 il n’y avait pas dans toute l’Acadie d’autre Allain que la famille de Louis établie sur le Cap. Pierre, fils de Louis, n’était pas encore marié à cette date, mais M. Rameau, à page 79 du tome II d’une Colonie féodale, nous apprend que Marie, fille de Louis Allain, épousa au Port-Royal, en 1715, Joseph-Nicholas Gauthier et qu’elle hérita de l’ancienne demeure de ses parents à Bélair. Quant à Pierre Allain, frère de Marie, nous trouvons dans un document, laissé par Robert Wroth et contenant les noms des 161 habitants des Mines, Pisiquid, et dépendances qui prêtèrent devant cet officier le serment de fidélité à sa Majesté le roi George le Second, le 31 octobre 1727, son nom au nombre de ceux qui prêtèrent ce serment. Pierre Allain était donc établi aux Mines à cette date et il y demeurait encore quand le cruel Winslow tendit son infâme guet-apens du 5 septembre 1755 aux Acadiens de Grand Pré. En effet par la liste des habitants des deux paroisses ecclésiastiques de Saint-Charles de Grand Pré et de Saint-Joseph de la Rivière-aux-Canards, aux Mines, inscrite dans le journal de Winslow, contenant le nombre des habitants, leurs enfants, leurs animaux, etc, des différents villages du Bassin des Mines, et fournie à Winslow, entre le 5 septembre et le 13 novembre 1755, par François Landry et autres prisonniers Acadiens dans l’église de Saint Charles de Grand Pré, nous voyons que Pierre Allain était établi au village de Pierre LeBlanc, dans la paroisse de Saint Charles de Grand Pré, qu’il avait avec lui un fils, deux fils, deux filles et possédait 7 bœufs, 5 vaches, 5 jeunes bestiaux, 26 brebis, 14 cochons et pas de chevaux. « Ce Pierre Allain était marié à Marguerite LeBlanc, fille d’Antoine (à Daniel) LeBlanc et de Marie Bourgeois, de la paroisse de Saint-Charles de Grand Pré. Un des frères de cette Marguerite LeBlanc était le brave Joseph LeBlanc dit Le Maigre, dont la vie a été si aventureuse. Elle avait aussi entr’autres frères, un du nom de Réné, né à Grand Pré en 1701, et mort à Miramichi en 1759. Ce dernier est le grand-père de Marie-Marguerite LeBlanc, épouse de Raphaël Poirier de Grand’Digue, et mère du regretté M. Simon Poirier de Shédiac. Dans le registre des Acadiens de la paroisse du Palais, à Belle-Isle-En-Mer, France, et publié dans le Canada-Français, livraison d’octobre 1889, on y trouve ce qui suit à propos de cette Marguerite LeBlanc, et de son mari : « Marguerite Leblanc, née en la dite paroisse (Saint-Charles de Grand’Pré), en l’année mil six-cent quatre-vingt-dix-neuf, et mariée à Pierre Allain, mort à Brest en l’année mil sept-cent quarante-quatre ou mil sept-cent quarante-cinq. La dite Marguerite LeBlanc de présent (1767) aux Isles Saint-Pierre et Miquelon. » « Il y a évidemment erreur quant à la date du décès de Pierre Allain. En effet, M. Rameau dit à la page 63 du tome II d’Une Colonie Féodale que le 20 mars 1745, Pierre Allain fit une supplique aux autorités britanniques à Annapolis, pour bâtir un moulin sur la rivière Chiconecto (Chignectou), et que cette demande fut vaine et inutile. De plus la liste des habitants du Bassin des Mines en septembre 1755 citée plus haut montre que Pierre Allain était encore vivant à l’époque de l’expulsion des Acadiens et qu’il demeurait encore à Grand Pré à cette date. S’il était du même âge que sa femme, il avait 56 ans à l’époque du grand dérangement. C’est probablement 1764 ou 1765 qu’on a voulu dire et non pas 1744 ou 1745, comme étant l’année de son décès arrivé à Brest, France. Si cette date, 1764 ou 1765, est la véritable, Pierre Allain est un autre des nombreux exemples de dislocation des familles acadiennes en 1755. Tout indiquerait qu’il fut fait prisonnier à Grand Pré avec son fils Benjamin, qu’on les transporta dans le mois d’octobre 1755 dans les colonies anglaises aujourd’hui Etats-Unis, d’où ils furent transférés en Angleterre dans le courant de l’année 1756, et purent passer en France en 1763. Il est un fait certain, c’est que son fils Benjamin, celui dont il est fait mention comme demeurant avec lui à Grand Pré, en 1755, avec ses deux sœurs, put revenir de la France à la Baie-des-Chaleurs, vers 1776, sur un des navires de la compagnie des Robin, à Paspébiac, P. Q. Benjamin Allain était marié à Rose Bujeau et il s’établit sur la rive nord de la Baie-des-Chaleurs, dans le comté de Bonaventure, et le 7 novembre 1794, son fils Louis, épousait à Carleton, P. Q., Madeleine LeBlanc, fille de Jean-Baptiste LeBlanc et de Marguerite Boudreau. De ce mariage naquit Lazare qui devint l’époux de Luce Landry, fille de Jean Landry et de Marie-Thérèse Richard de Carleton, P. Q. Cette Marie-Thérèse Richard était la fille de Pierre Richard et de Marie Bourg (aujourd’hui orthographié Bourque). Cette dernière était la sœur du Rév. Joseph-Mathurin Bourg, prêtre acadien, né en 1744 du mariage de Michel Bourg et d’Anne Hébert. Lazare Allain, époux de Luce Landry, est le père de feu le Rév. Jean-Louis Allain, prêtre acadien, et de Gillette Allain, épouse de Pierre Allard, et mère de M. l’abbé J. Théophile Allard, curé de Caraquet. (à suivre.) Votre serviteur, SYLVAIN.