Westmorland

Newspaper
Year
1893
Month
2
Day
16
Article Title
Westmorland
Author
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Page Number
2
Article Type
Language
Article Contents
WESTMORLAND. Nous avons la semaine dernière dit un mot touchant la résignation de l’hon. M. Richard et aujourd’hui nous revenons plus longuement sur le même sujet. Ce qui nous porte à ramener ce sujet est l’avis publié dans le Royal Gazette. Pour plus de quarante ans les Acadiens de Westmorland ont élu un des leurs à la législature du Nouveau-Brunswick presque sans interruption jusqu’aux élections générales d’octobre dernier. De 1870 jusqu’à 1883, à part de quatre années, le juge Landry a été le député du comté. A cette dernière date il résigna son siège pour briguer les suffrages dans le comté de Kent pour la chambre des communes. On se demande naturellement comment se fait-il qu’un Acadien ait été élu continuellement dans le comté de Westmorland. La réponse est bien simple : C’est qu’alors il n’y avait pas autant de prétendus politiciens qu’il y en a à présent. Chacun alors semblait savoir ce que signifiait le vrai patriotisme et s’unissait pour l’intérêt commun de la nationalité en donnant son support à l’hon. M. Landry, l’homme le plus capable. Mais il est bon de remarquer ici qu’en 1883, quand M. Landry résigna son siège pour aller dans Kent, M. O. M. Melanson était alors un bébé en politique, et on se demande aujourd’hui s’il ne l’est pas encore. En 1881, celui qui était alors le pouvoir gouvernant en politique dans le comté de Westmorland, feu sir Albert J. Smith, fit des propositions à l’hon. A. D. Richard pour le faire porter candidat contre l’hon. M. Landry aux prochaines élections. On assurait son élection et on lui offrait de déposer $1500 à la banque à son nom à part cela. La réponse de l’hon. Richard fut celle-ci : “Je ne puis accepter votre offre, car en le faisant je diviserais le vote français dans le comté de Westmorland et Dieu sait que nous sommes déjà assez faibles.” Voilà la réponse d’un patriote. L’hon. M. Richard était alors au début dans la pratique de sa profession, et avait bien peu de ressources pécuniaires ce qui rendait plus difficile encore le refus de l’offre qu’on lui faisait, mais le vrai patriotisme remporta la victoire sur son ambition personnelle. Cet acte d’abnégation de la part de l’hon. M. Richard est véridique et nous tenons la chose de la bouche de celui qui lui a fait cette offre. M. O. M. Melanson a-t-il suivi cet exemple? Oh! non. Lorsqu’il fut élu en 1890, il promit formellement au Dr. E. T. Gaudet, qu’il ne se présenterait pas à la prochaine élection, si le docteur ne voulait pas l’opposer dans l’élection de 1890. En bon patriote le Dr Gaudet appuya M. Melanson de toutes ses forces et celui-ci fut élu. Plus tard à un banquet publique donné à Bouctouche, il y a deux ans, M. Melanson promit publiquement qu’il ne serait pas l’adversaire de l'hon. M. Richard aux prochaines élections. Des personnes dignes de foi qui assistaient à ce diner sont prêtes à prouver cette assertion. Maintenant voyons sur qui retombe la faute de ce que nous n’ayons pas un des nôtres au conseil exécutif du Nouveau-Brunswick et quel est le vrai patriote et l’homme de cœur pour ses compatriotes, M. Richard ou M. Melanson. Dans le cours de l’été dernier, lorsqu'il fut rumeur de la dissolution des chambres, l’hon. M. Richard fut demandé par un grand nombre des électeurs de se porter candidat dans le comté de Westmorland. Se fiant à la parole d’honneur de M. Melanson, donnée publiquement comme on l’a vu ci dessus, M. Richard accepta la candidature. A l’approche des élections il fut rumeur que Son Honneur le juge Landry était disposé à descendre du banc pour briguer les suffrages du peuple dans Westmorland, alors l’hon. M. Richard se rendit immédiatement chez le juge Landry et lui dit que s’il voulait se présenter il (Richard) se retirerait en sa faveur et l’appuierait de toutes ses forces comme il avait fait dans le passé et par là consoliderait le vote français du comté. Son Honneur refusa de revenir sur l’arêne politique ayant eu cependant la promesse de M. Melanson, et de son mentor, M. Robidoux, de l’appuyer. L’administration Blair offrit alors à l’hon. M. Richard un siège au conseil exécutif avec le portefeuille de solliciteur-général. Il faut ici se rappeler que depuis 1878 les catholiques du Nouveau-Brunswick out toujours eu deux de leur croyance religieuse dans le cabinet de cette province sœur, et M. Richard par l’acceptation de ce portefeuille plaçait ses coreligionnaires sur ce même pied qu’auparavant au conseil exécutif. Mais le “Grand je suis”, M. Melanson, dit non, M. Richard doit d’abord avoir ma permission. M. Melanson oubliait que M. Richard avait non seulement été le représentant des Acadiens de Westmorland trois courtes années, mais qu’il avait représenté les Français de toute la province pendant dix ans dans la plus haute branche de la législature, au conseil législatif. Il est vrai qu’il n’était pas élu par le vote direct du peuple, mais par les représentants du peuple. Nonobstant ceci M. Richard, connaissant l’orgueil et la jalousie de M. Melanson, se rendit à Shédiac et s’arrangea pour avoir une entrevue avec Melanson, mais à l’heure convenue M. Melanson ne fit pas acte de présence. C’était certainement suivant les convenances la place de M. Melanson d'aller rencontrer M. Richard et non celle de M. Richard d’aller voir M. Melanson. Nous nous rappelons bien, il y a quelques années, aux séances du conseil municipal à Dorchester, quand M. Melanson était le conseiller municipal de la paroisse de Shédiac, et M. Richard celui de Dorchester, avoir remarqué que M. Melanson était comme du mastique entre les mains de l’hon. M. Richard, et qu’il ne faisait rien sans l’avis et l’aide de ce dernier. Nous ignorons si la même chose a été répétée à Frédéricton. Mais passons. Aux dernières élections M. Melanson se joint à une combinaison adverse à celle de l’hon. M. Richard et resta à la queue des polls, tandis que l’hon. M. Richard fut battu seulement par quatre voix, mais le gouvernement est maintenu par une écrasante majorité. Alors un des collègues de M. Richard, dans le but de rendre justice aux Acadiens de Westmorland, offre de se démettre de son siège en faveur de l’hon. M. Richard. Ce dernier se rend chez M. Melanson et lui demande de lui promettre formellement qu’il ne l’opposera pas, de manière à ce qu’il (Richard) soit élu par acclamation, et alors il aurait pu garder son siège à l’exécutif de la province et être en mesure de sauvegarder les intérêts de ses nationaux. Mais le grand patriote et politicien répondit non, je ne vous ferai pas cette promesse. M. Richard sachant—comme chaque électeur au reste—qu’il pouvait être élu contre M. Melanson, si celui ci était seul sur les rangs, craignit que le mentor de M. Melanson lui conseillât de nouveau de se présenter, et qu’au dernier moment un Anglais posât sa candidature, et que ce dernier fit perdre l’élection des deux candidats acadiens, et ne voulant pas voir se répéter dans Westmorland ce qui est arrivé dans Kent en décembre dernier, résigna très sagement le seul portefeuille qu’avait un catholique dans le cabinet de la province du Nouveau-Brunswick. A présent quel est le meilleur politicien et le plus grand patriote ou de l’hon. M. Richard ou de M. Melanson? Lequel de ces deux a montré la meilleure preuve de désintéressement? C’est certainement M. Richard. Qui est la cause que les Acadiens du Nouveau-Brunswick n’ont pas un des leurs dans les conseils de la nation? C’est assurément M. Melanson et son mentor, le Moniteur Acadien, et nul autre. Qui a empêché les François de Westmorland d’avoir un des leurs dans la chambre d'assemblée, privilège dont ils ont joui pour plus de quarante ans? Ce sont encore M. Melanson et le Moniteur. Que M. Melanson et le Moniteur continuent leur œuvre néfaste au détriment des Acadiens du Nouveau-Brunswick et dans dix ans d’ici, un étranger repassant les annales du Nouveau-Brunswick ne saura pas qu’un seul Acadien y réside. Que les Acadiens de Westmorland considèrent leur situation politique actuelle dans la législature locale, et ils verront promptement sur quelles épaules il faut jeter le blâme et la cause d'être privés d’un des leurs dans le conseil exécutif de la province et d’avoir pour les représenter quatre députés de nationalité différente. M. Melanson et son mentor, le Moniteur, doivent en prendre tout le blâme, car ils le méritent.