Correspondance: le vrai patriotisme

Newspaper
Year
1893
Month
1
Day
5
Article Title
Correspondance: le vrai patriotisme
Author
Philios
Page Number
2
Article Type
Language
Article Contents
CORRESPONDANCE. Le vrai patriotisme M. le Rédacteur, Sans vouloir faire une étude approfondie sur ce grand et sonore mot de Patriotisme, je me permettrai d’en donner quelques notions, suivies de commentaires pratiques. Le Patriotisme tel qu’interprété par les Païens, nous le savons, était un dévouement sans bornes à la cause commune. Chez les anciens, les fatigues, les privations, la mort même étaient comptées pour rien quand il s’agissait de servir la patrie. Tels les grands législateurs et les héros de la Grèce. Pas moins fameux les guerriers romains. Si, dans les hommes, je mêle à ce sentiment d’amour de la Patrie, un zèle religieux qui souvent domine, je nomme les illustres Macchabées dans leurs magnifiques faits d’armes, les Mahométans dans leur féroce énergie dans les combats et en premier lieu peut-être les nations chrétiennes, qui surent mieux que toute autre protéger leurs institutions, abritées toujours par le noble drapeau de la Patrie. Ce sentiment du Patriotisme est donc inné à l’homme. L’Indien refoulé au Nord-Ouest par la civilisation européenne le possède à un aussi haut degré que le Français, l’Anglais, etc, qui sont venus lui disputer les possessions de ses pères. Chaque homme qui a du cœur aime son pays et doit fournir à sa patrie, quand sa patrie le demande, les preuves de son attachement. Ces preuves comme je l’énonçais plus haut doivent être des preuves non pas capricieusement théoriques mais foncièrement et surtout pratiques. Un travail éclairé pour promouvoir les intérêts communs, les fatigues, les privations, la mort même pour écarter les dangers qui menacent la cause commune et honorer le drapeau qui nous protège. Maintenant laissons ces grands principes et venons étudier et psalmodier, s’il y a moyen, le Patriotisme que quelques soi-disant patriotes enseignent au pays d’Evangéline. Oh! la partie théorique est magnifique extérieurement parlant. On les entend pérorer : c’est grandiose! épatant! La Patrie! La Patrie!— Elle est malheureuse la Patrie! jérémiadent-ils du toît de leurs greniers, voire même du haut de leurs clochers et l’écho plaintif répète encore “La Patrie! La Patrie”. Pouf!... Oui la Patrie est en deuil; elle est trahie, conspuée, honnie! et le tambour, bat les cymbales retentissent et les hourrahs et les applaudissements de pleuvoir drus et puissants…..Eh! c’est de la Salvation Army que tout cela : et sur toute la ligne du fameux bataillon vole à tir d’aile le cri de : “Vive nos chefs! Vive Robidoux, notre Porte-Etendard! Vive Poirier, notre capitaine!—chic! les voilà organisés. Voyons les à l’œuvre maintenant. Il y a à peu près 25 ans, la lumière a surgi de la Batture de Shédiac. Le Moniteur alors le seul organe des Acadiens devint l’Instructeur autant que le Prophète des quelques milliers d’Acadiens disséminés dans les Provinces Maritimes. L’œuvre était grande et belle et nous offrons nos meilleures félicitations à Mr Robidoux pour le zèle infatigable qu’il déploya en ces premiers temps. Plus tard mal lui en prit. Ses élèves ou plusieurs d’entre eux aussi savants sans doute que le maître devinrent récalcitrants. Ils s’aperçurent que le pays (je parle des Provinces Maritimes) devenait la proie des monopoleurs et des manufacturiers d’Ontario et de Québec. Ils virent que les fermiers, les piliers du peuple, étaient devenus des colonnes d’ignominie aux mains d’un gouvernement corrompu à Ottawa. Ils se dirent : “Il faut protester contre la ruine de nos fermiers, contre l’expatriation de nos cher enfants.” L’Hon. Mr. Perry de l’Ile du Prince Edouard, un homme érudit, un Acadien distingué a ouvert la voie à des idées plus larges. Il a protesté et proteste encore contre ce gouvernement conservateur qui détruit notre chère Acadie. Et le Moniteur ne le mentionne même pas. Il n’est pas de la clique conservatrice de Shédiac donc, c’est un vaurien. Lequel des deux est le vrai patriote? Examinez, cher lecteur. L’Hon. O. J. LeBlanc vient ensuite dans l’arène. Il voit et comprend lui aussi le mouvement rétrograde qui s’opère dans nos provinces par une politique qui mine la base de notre progrès national, les fermiers. Il veut lui aussi les assister et pour cela s’adjoint au gouvernement Blair d’abord. “ Vix” l’en blâme. A-t-il raison? LeBlanc n’a-t-il pas rendu à Kent justice, et justice parfaite, pendant qu’il administrait les affaires de son comté? Est- ce que Blair et son administration n’ont pas rendu justice aux catholiques de la province, la minorité? Voyez maîtres Poirier et Robidoux et ejusdem farinae. Que font-ils? LeBlanc arrive au ministère oh! c’est par trop fort! et c’est alors que toute la machine de Shédiac “l’Armée du Salut” de la nation s’organise. C’est toute une batterie que celle de la Batture. Les insultes commencent à pleuvoir; les invectives, les surnoms de traître, de Judas, sillonnent l’air de par les ateliers du Moniteur et à chaque élection depuis 4 à 5 ans ce fut à recommencer. C’est un Acadien voyez vous qui ne voit point par les lunettes de maîtres Robidoux et Poirier : il faut l’abattre. On voudrait l’adjoindre à la Salvation Army et LeBlanc n’en veut pas. On voudrait qu’il ferait cortège pour accompagner la vache grasse du gouvernement d’Ottawa et LeBlanc brise avec eux les chaînes iniques qui nous tiennent encore dans l’Esclavage. LeBlanc devient Libéral pour le bien du peuple. C’est surtout alors que l’infernale machine de Shédiac se déchaîne. “Il faut qu’il meure cette fois-ci!” s’écrient-ils. Et les vociférations, les injures de pavoiser Moniteur après Moniteur contre le brave Acadien LeBlanc jusqu’à ce qu’on lui ait fait perdre encore la dernière élection fédérale. De par quel droit maîtres Robidoux et Poirier écrasez-vous un tel patriote? LeBlanc n’est pas, il est vrai, le Pascal qui a raté misérablement dans l’obtention du patronage du comté, Mr Carlyle étant l’officier rapporteur quand il, Mr Poirier, ne semble n’avoir rien à dire des fraudes que nous avons à déplorer. Cependant l’Hon. O. J. LeBlanc est aussi Acadien que Poirier, aussi patriote que Robidoux et Poirier ensemble. Il en a donné les preuves. Robidoux et Poirier sont accrochés au gouvernement. LeBlanc est indépendant et n’a rien à demander que la justice. Que vous reste-il à faire maintenant, Eminentissimes Robidoux et Poirier, après la dernière lutte dans Kent? Vous gratter les dents. Ce que vous aviez préparé pour Kent est accompli : l’Anglais domine et l’Acadien est sous les pieds. Jouissez donc de votre triomphe, chefs perfides, Judas de la Patrie, votre œuvre est consommée. Vous, cher Sénateur, qui traitiez, l’Hon. O. J. LeBlanc de traître et de Judas, il y a à peine quelques semaines à St-Louis. Judas parcequ’il avait en horreur votre politique, hé bien! aujourd'hui presque tout le comté de Kent vous met au même banc et c’est à vous qu’on décerne ce titre de perfide, puisque vous avez avec le Moniteur immolé la Patrie à vos principes pourris de conservateurs. Allez! votre front est indélébilement marqué et ne venez plus nous parler de Patriotisme. LeBlanc est tombé en Acadien dévoué à sa Patrie, en brave, vous l’avez écrasé; vous tombez en hébétés et en perfides Judas, vous. Allez vous pendre maintenant. Mais non pas encore—Ecoutez le reste de votre procès. Je ne suis pas votre juge mais je suis un témoin. Le vrai patriotisme ne consiste-t-il pas pour nous de nous unir, de lutter ensemble, d’essayer d’améliorer notre condition, en encourageant, soutenant nos premiers hommes à arriver aux premières places? Bien! Là au moins nous aurions des défenseurs de nos droits, nos intérêts seraient sauvegardés. Et dans les rangs des Acadiens il en est si peu encore qui peuvent arriver!... Mais non, d’après le Moniteur et je fameux Sénateur n’arrive pas qui veut. Un Acadien peut-il se faire élire dans son comté que les chevaliers de la Batture le mettent au banc et le jugent incontinent. Le monsieur de Kent veut arriver d’après “Vix” mais “Vix” ne trouve pas que ses lunettes lui font. Alors c’est un traître il faut l’écarder. Oh! le lorgnon de Shédiac: il faudra encore plusieurs mouchoirs de soie d’Ottawa pour le rendre diaphane! Je disais tout à l’heure que nos hommes d’état étaient clair-semés mais voyez, cher lecteur, si nous n’avons pas tout à craindre des maîtres Robidoux et Poirier? Pendant 5 ans, ils ont fait mer et monde pour détruire LeBlanc. Ils lui auraient préféré un sauvage. Phinney étant là : ils l’ont adopté. Phinney aujourd’hui leur impose McInerney. Il faut qu’ils l’avalent: triste déjeuner quand ils l’ont vômi des centaines de fois. Mais c’est assez bon pour des traîtres de leur espèce. Ce n’est que le commencement de leur festin. La Salvation Army de la Batture n’a pas encore terminé son œuvre anti-patriotique. M. Melanson surgit ensuite et c’est encore le Moniteur, Poirier et la Clique de Shédiac qui induisent ce brave patriote à méprisez Blair et sa juste administration et aujourd’hui le pauvre Melanson porte son deuil. Il n’est plus! Le Moniteur et consorts peuvent se frapper la poitrine et dire individuellement leur Meâ Culpâ. Une autre victime d’immolée!..... Mr. Richard, un autre Acadien éminent, tout aussi patriote que Poirier—quoiqu’on en dise—est aussi immolé au soi disant autel de la patrie et le Moniteur et Poirier sont dans la jubilation. Amen. Mr. Labillois arrive-t-il à nous représenter à Frédéricton dans le Conseil Exécutif, que le Moniteur et ses satellites sont là pour mettre tout à feu et à sang pour le détruire..... Voyons! Mr Robidoux & Cie, est-ce que le Patriotisme vous a fait naitre, vous, pour vous, vouer à détruire nos premiers hommes? Vous mettez un acharnement à toute outrance à notre abaissement national, et vous criez; Patrie! Patrie! Patrie! A quoi bon la Patrie quand vous la démolissez?... Pouvez-vous, vous, les Robidoux et les Poirier, nous dire à nous, 65 milles Acadiens que vous avez désormais les rênes de notre administration? Allez-vous nous dire que vous nous menez par le bout du nez? Mais sachez donc qu’il y a au moins un brin d’intelligence à part les cervelles Poirier et les autres. Reconnaissez-le donc, aimables Messieurs. Laissez arriver ceux de vos concitoyens qui peuvent améliorer votre sort et le sort de leurs frères. Vous, cher Mr Vix-Pascal, ne vous troublez pas tant quand un homme du peuple peut arriver. Après tout ce sont eux qui travaillent pour l’Acadie. Les Amand Landry, les Johnson, les LeBlanc, ont été les pionniers dans la cause Acadienne. Ne les foulons pas aux pieds de quelque couleurs qu’ils appartiennent! Qu’ont fait Poirier, P. A. Landry et Robidoux, ces patriotes tant vantés? Ils se sont cherché des places, des fauteuils bourrés, des salaires gras, honorifiques et maintenant ils rient de vous, Acadiens, ils se moquent de vous, fermiers. Ils ont des lunettes et vous n’en avez pas. S’ils avaient été patriotes eux, des jeunes gens, ne seraient-ils pas restés au milieu de la bataille que nous Acadiens actifs nous avons à livrer? Les A. Landry les U. Johnson et le vieux LeBlanc les surpassent en vrai patriotisme. On est patriote, non avec des mots, qu’ils soient filés ou brodés, mais avec des actes, et des actes accomplis avec des sacrifices, en faveur de la Patrie. Qu’ont fait Poirier, et Landry, et Robidoux pour notre cher pays? Voyons, lecteurs intelligents, examinez : tous les trois se sont admirablement nichés et pauvres Acadiens ruinés est-ce à eux maintenant que vous voulez fier vos futures destinées? Non, non. Vous avez trop d’intelligence pour cela. Il n’y a guère longtemps, vous Mr. Robidoux, vous aviez tout à dira en Acadie. Aujourd’hui nous avons deux autres journaux français, et que voyons nous? Toute votre batterie fanatique est dressée contre l’EVANGÉLINE et le Courrier. Ce sont d’après vous une fille et un confrère perdus. Pourquoi?... J’aimerais de le savoir... Ajustez vos lunettes s’il vous plait et répondez. Est-ce que ces deux organes acadiens ne valent pas autant que le vôtre, Mr Robidoux, en intelligence, en principes, en patriotisme? Vous essayerez encore, peut-être d’aveugler des aveugles, de bourrer des ignorants; mais il est certain que le vrai patriotisme vous passe loin du nés : les preuves en sont évidentes, quand on vous voit à l’œuvre, Vos bévues ont fait ouvrir les yeux du peuple acadien; et désormais sachez le, on vous regarde avec méfiance dans nos rangs. Pour terminer je dis et le Kent acadien l’affirme que la honte de la défaite du dernier député acadien à Ottawa revient : 1° A Mr le cher Sénateur Poirier qui vint imposer aux Acadiens de Kent et le soutenir un homme tout à fait incompétent, un bébé, encore dans ses caprices. 2° A Mr, Robidoux qui appuie le même Mr. Johnson cette fois-ci contre les Phinney les Jardine, les petit Jean Bte traîtres à leur propre choix dans la convention de Bouctouche. Il n’a pas eu le courage, ce cher Robidoux, de ses convictions! Pauvre salairrié va! Enfin en 3° lieu à Mr Johnson lui même qui veut avec Robidoux et Poirier détruire LeBlanc. On savait fort bien que le Petit Basile ne serait pas élu. Quand on pense Mr McInerney avait le boodle du gouvernement. Et cependant Basile avait les ordres de continuer pour tuer LeBlanc. Il l’a fait et sa patrie est privée de représentant à Ottawa! Qu’ils jouissent de leur triomphe inique, mais le Moniteur et Poirier ont devant eux un patriotisme à envisager. Sont-ils patriotes? qu’ils le prouvent. Moi en attendant je suis PHILOS. (Prière au Courrier de Bathurst de reproduire.)