Ste-Marie

Newspaper
Year
1891
Month
10
Day
1
Article Title
Ste-Marie
Author
-------
Page Number
2
Article Type
Language
Article Contents
STE-MARIE Le plâtrage du nouveau collège sera complètement terminé cette semaine. A l’extérieur, les peintres sont à donner la troisième couche de peinture; ils espèrent finir cette semaine. À l’intérieur, les ouvriers posent les dernières boiseries et clouent le second plancher. Dimanche dernier, la grand’messe a été célébrée par le Revd Père Ozanne qui est arrivé de France, il y a huit jours. Le Rev. Père Haquin, prêtre eudiste, qui nous est venu aussi dans les premiers jours de septembre, touchait l’orgue et le chœur, sous la présidence du R. P. Lanos, nous a donné d’excellents morceaux de chant. Les deux Pères récemment arrivés seront employés au collège. Le Révérend Père Bourgeois a exposé en homme d’expérience et de jugement ce qu’il attendait du collège Ste-Anne et de ses compatriotes Acadiens. Cette conférence a produit sur ses nombreux et sympathiques auditeurs la plus profonde impression et bien qu’il n’ait pas voulu nous communiquer son manuscrit, ses paroles se sont assez fortement gravées dans notre mémoire pour que nous les offrions à la méditation de nos lecteurs; en voici un aperçu. Il était dit dans l’Evangile du jour qu’un prince poussé par sa générosité, convia à un banquet magnifique plusieurs de ses connaissances; ses serviteurs portèrent les invitations; mais, n’eurent pour toutes réponses que des refus, des raisons sans fondement; chacun des invités déclina l’honneur d’un festin si libéralement offert. S’il ne se fut agi que d’un fait de cette importance ou la politesse et savoir-vivre étaient méconnus seulement je ne le vous signalerais pas; mais sous ce symbole dégagé de toute comparaison matérielle, je trouve le banquet sacré de l’autel et de la chaire où l’on communie au sang de Jésus et à la parole de sa bouche. Toutefois ce n’est pas encore là que je m’arrêterai. Le festin où le corps et le goût ont seuls part n’est pas digne de nos remarques; celui de l’âme de Jésus Christ nous le présente et vous vous en nourrissez chaque dimanche par la voix du prêtre; mais à ces deux banquets, corporel et spirituel, il faut ajouter le banquet intellectuel et il me semble bien important, chers compatriotes et frères, d’y fixer notre attention. Tout homme a ses droits de citoyen, tout homme a, en retour, un devoir à remplir; s’il peut exiger de la société domestique, civile et religieuse, qu’elle veille à son bonheur, à sa sauvegarde et à son âme, lui, se doit dans la mesure de ses aptitudes et de ses forces aux unes et aux autres. Certes, je vous connais trop pour douter de la tendre sollicitude dont vous entourez vos enfants, la vie vous serait moins chère que leur sécurité, la torture moins cuisante que leurs souffrances d’un moment; mais, entre ces deux étapes de la vie, l’enfance sur vos genoux et l’adolescence déjà libre, n’avez-vous plus de devoirs à l’égard de la jeunesse! C’est à cette époque nu contraire que pèse sur vous la plus lourde et la plus noble charge après tout, de la paternité, l’éducation du jeune homme; car, remarquez-le bien, si par votre apathie vous frustrez la société ou l’église des services d’un de vos enfants sur lequel comptait le pays ou que l’autel attirait, vous aurez à en répondre. Autrefois, alors que le patrimoine n’était pas morcelé, le chef de famille groupait autour de lui ses enfants; aujourd'hui l'héritage paternel ne se trouve plus suffisant aux besoins d’une famille; faudra-t-il que par une sorte d’arrêt judiciaire le père condamne à l’exil et à un travail mercenaire ses fils déshérités! Eh bien! c’est du côté des professions libérales qu’il faut tourner les yeux, vers ces postes qu’un peu de science atteint. Au lieu de tenir les assises qui désigneront celui qui tentera la fortune loin des siens, qu’on se réunisse en conseil, que le plus capable au jugement de tous suit désigné pour suivre les cours; il fera son chemin, soutenu par ses frères, sur qui rejaillira peut-être l'honneur incomparable du prêtre, mais qui auront toujours donné au pays un citoyen utile, sinon éminent. Ainsi chaque foyer peut envoyer un des siens au collège. Voyez plutôt le collège d'Antigonish qui a donné 2 évêques et près de 60 prêtres, plusieurs médecins et avocats. St-Dunstan de l'Ile du Prince-Edouard, qui a son tour a fourni un archevêque, un évêque, plus de 30 prêtres et des hommes de toutes les professions. Au Nouveau-Brunswick, le collège St-Joseph, qui ouvrant une ère nouvelle est allé tendre la main à une race de déshérités; ses élèves de toutes les langues, de toutes les races ont eu accès aux positions les plus enviées et font honneur à leur Alma Mater. Les Acadiens de l’Ouest de la Nouvelle-Ecosse sont aussi à l’aise que les Ecossais des îles du Cap-Breton et St-Jean. Calculez vos dépenses inutiles; mais, jamais homme n’a porté au registre de ses dépenses l’argent perdu, il ne compte que ce qu’il emploie au service des bonnes causes et il le trouve excessif; Dieu en sera le juge! Non, les prix sont modérés et le directeur dévoué de cette œuvre est toujours prêt à favoriser et seconder vos efforts. Que manque- t-il donc ? L’intelligence ? Vous et moi serions également insultés d’une pareille supposition; vous pouvez à l’instar des autres établissements fournir votre contingent quant au nombre et au talent. Veuillez seulement. Dans l’Evangile du jour, je vois, les amis du roi vaquer à de futiles occupations plutôt que de se rendre au festin qui les attend; des étrangers sont appelés, ils recueillent les fruits de la générosité du maître. Le collège Ste-Anne, vous envoie à la nourriture intellectuelle, prenez-y les premières places qui vous appartiennent. N’attendez pas qu’on aille chercher par les carrefours, car, alors ce sera à votre détriment; l'histoire et l’expérience le prouvent, la parole du Divin Maître en est, au reste une garantie. Votre archevêque a fait noblement son devoir, il a sauvegardé vos droits en vous garantissant, moyennant votre aide une maison d’éducation; les Révds PP. Eudistes sont venus à son appel, sacrifiant pays, famille, sacrifiant à l’Acadie d’hier, l’antique et beau pays de France; à vous donc de seconder ces dévouements, pour que l’œuvre établie prospère et grandisse pour le bien et l’honneur des familles, des paroisses acadiennes, pour la gloire de notre province, pour l’Eglise et pour Dieu.